Voici, proposée par Monsieur Robert LARUE, une fort agréable promenade à travers le territoire de Gagnac-sur-Cère et ses alentours, balisée par ses noms de lieux.
L ‘entreprise n ‘était pas aisée. Aux difficultés inhérentes aux recherches qui, en onomastique, font appel à diverses sciences (histoire, géographie, phonétique, sociolinguistique, etc.) s ‘ajoute le fait que Gagnac-sur-Cère se situe sur une zone frontière où s ‘interpénétrent des apports divers.
Frontières géographiques et politiques entre tribus gauloises, entre provinces d ‘Ancien Régime, entre évêchés, et plus près de nous entre départements,… sans oublier le particularisme de la vicomte de Turenne.
D ‘un point de vue linguistique, Gagnac-sur-Cère se trouve dans une zone de contacts où s ‘entremêlent diverses variantes des parlera quercynois, limousins et auvergnats, dans un contexte d ‘éparpillement dialectal Cette petite cité, caractérisée par un cours d ‘eau, se trouve dans une zone de passage, de descente des gens de la montagne vers la plaine, vers Bordeaux, Toulouse, Barcelone, selon un phénomène de tombada qui ne s ‘estompera qu ‘avec l ‘arrivée du chemin de fer et la « montée  » vers Paris.
On assiste ainsi à une superposition de substrats et de superstrats et cela jusqu ‘à nos jours. Malgré les apports divers et leurs déformations locales, on constate depuis le Moyen Age la permanence d ‘une langue occitane comprise par tous grâce aux échanges favorisés par la circulation des marchands et des petits métiers (scieurs de long, rémouleurs, rétameurs…), les foires et la transhumance.
Dans le parler actuel s ‘entrecroisent plusieurs couches linguistiques. A la première implantation, pré-indoeuropéenne, succède l ‘arrivée des Celtes, puis des Gallo-Romains dont nous sommes héritiers directs à travers l ‘occitan : l ‘ensemble de son vocabulaire, et les noms de lieux en – ac témoignent d ‘une mise en valeur du pays et d ‘une sédentarisation importante. Très rares sont, dans ce contexte de romanisation, les noms de lieux en – ac qui ne remontent pas à l ‘installation d ‘un colon gallo-latin.
Ainsi, la plupart des noms de lieux de Gagnac-sur-Cère sont d ‘origine occitane et apparaissent ou sont remotivés du Moyen Age à nos jours. N ‘oublions pas que les divers occitanophones unilingues ne se sont éteints que dans les années 1940… L ‘apport du français quant à la création lexicale est récent et peu représenté.
Depuis l ‘Édit de Villers-Cotterêts, l ‘écriture de Foccitan avec le système orthographique du français entraîne parfois des déformations aberrantes. La pression orthographique de la langue dominante ne doit pas faire croire à une arrivée massive de termes originaires du nord de la Loire.
Dans un tel foisonnement de formes et d ‘origines possibles, il serait bien difficile (et bien naïf!…) de ne retenir qu ‘une solution. Quelques termes restent une énigme dans l ‘attente de la découverte d ‘un document explicite.
Quoi qu ‘il en soit, les travaux de Monsieur Robert LARUE imitent à une redécouverte du patrimoine local, et l ‘on ne peut que Fen féliciter. Il serait souhaitable que ses propositions débouchent sur une signalisation bilingue des noms de lieux revisités de Gagnac-sur-Cère.

Gaston BAZALGUES
Université de Montpellier