Catégorie : Histoire

Charles Dumont

Charles Dumont né à Cahors, le 26 mars 1929,
nous a quittés dans la nuit du 17 au 18 novembre

Voici l’article que Quercy net lui avait consacré en 2015

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Ses études (médiocres), il les a faites à Toulouse. Sa passion de toujours : la musique. Mais, ni le piano, ni le solfège, ni la théorie ne se laisseront apprivoiser, dans un premier temps. La révélation viendra du jazz. La découverte de Louis Amstrong fera naître sa vocation pour la trompette. Monsieur Déjean, son professeur toulousain décèlera son talent d’instrumentiste.

Il était une fois…

A 15 ans, dans les années d’après-guerre, il crée son premier orchestre de jazz amateur, puis il monte à Paris, après l’obtention d’une médaille au Conservatoire de Toulouse.

L’accident : Dans le Paris des années difficiles, Charles subit une ablation apparemment bénigne des amygdales. II reprend prématurément ses exercices à la trompette, et c’est le drame, hémorragie, hospitalisation au sortir de laquelle la pratique de cet instrument lui est définitivement interdite.

Charles repart de zéro : Solitaire et démoralisé, il entre dans une église, Saint-Ambroise où Maître Paul-Silvia Hérard, titulaire des Grandes Orgues, est au clavier. L’organiste accepte de donner des leçons au jeune homme désemparé. Au terme de celles-ci, Charles, maîtrisant le clavier et l’harmonie, découvrira sa voie: il veut être compositeur de chansons.

Jusqu’aux années soixante : il fait, pour vivre, tous les petits métiers qui n’en sont pas, il compose , et doit à des femmes (déjà) ses premières rencontres déterminantes, celle du poète Francis Carco et celle de Michel Vaucaire. La suite appartient à la carrière  » en chansons  » et à la vie privée de Charles Dumont, l’une et l’autre bien remplies.

Les années Piaf

5 » Cette chanson est tellement pour moi que je ne la chanterai pas. On dirait que je me pastiche « . C’est dans ces termes qu’Édith Piaf venait de refuser la ènième chanson du tandem Vaucaire-Dumont présentée par un éditeur. Aussi Charles n’espérait-il plus la rencontre avec Edith. Celleci, grâce à l’entêtement de Michel Vaucaire, eut lieu le 5 Octobre 1960, boulevard Lannes, chez Edith.

Non je ne regrette rien bouleversa Piaf et lui donna, de son propre aveu, l’énergie et le courage nécessaires pour faire sa rentrée à l’Olympia, en dépit d’un état de santé catastrophique. Créée en direct à Cinq colonnes à la Une, le plus prestigieux des magazines TV jamais réalisés, la chanson fit pleurer la France entière.

De la rencontre Piaf-Dumont naquit une quarantaine de chansons, le plus souvent signées Vaucaire-Dumont, parmi lesquelles Mon Dieu. Mais c’est une chanson signée Piaf-Dumont qui allait faire évoluer, sans qu’il en soit pleinement conscient, le sort de Charles. Piaf avait décidé qu’il l’interprèterait lui-même et qu’elle serait sa choriste. C’est donc avec Les Amants que Charles se vit propulser  » interprète « , presque à son corps défendant et qu’il fut amené sur scène auprès de Piaf.

Dans l’ombre des  « années perdues ». C’est Charles lui-même qui appelle  » années perdues  » cet espace entre la fin de Piaf et le début de sa propre carrière d’interprète. Pourtant, ces années-là auront été plus fructueuses qu’on ne l’imagine. Pour le cinéma, Charles aura composé les musiques deTrafic et parade (films de Jacques Tati), et d’un film italien interprété par Elsa Martinelli Pour la TV, Charles aura composé les musiques et chansons des feuilletons Gorki le diable etMichel Vaillant. Aux USA, Charles aura rencontré Alan J. Lerner, père de My Fair Lady, Gigi, Un Américain à Paris… malheureusement, la comédie musicale issue de leur collaboration ne sera jamais montée.

En revanche, Barbra Streisand, alors inconnue en France, enregistrera I’ve been here , en français Le mur, dont elle fera un succès outre-Atlantique. Dans cette grande époque des concours de chansons internationaux, Charles connaîtra quelques succès primés, dont Un Dimanche après la fin du monde, à Rio de Janeiro..


Non je ne regrette rien, un succès mondial, intemporel

Si la voix de Piaf a transporté  » Non Je ne regrette rien  » à travers les continents, la chanson s’est envolée de ses propres ailes pour vivre sa vie à travers des interprétations multiples et parfois inattendues, celles de Duke Ellington et Shirley Basset, celle de la japonaise Yusiko Ishii et, pour la génération montante, celle des Garçons Bouchers et l’amusante prouesse de Bernadette Soubirous et ses Apparitions… sans parler des corps d’armée qui ont pu, ça et là, en faire spontanément leur hymne. Quand une chanson prend vie, on n’en maîtrise pas le devenir…

Les années Dumont

En 1963, la disparition de Piaf isole Dumont, dont le nom et le style semblent définitivement liés à son irremplaçable interprète. Jusqu’au seuil des années 70, ce sera le purgatoire, doré, certes, mais purgatoire tout de même.

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Écrite en 1967 avec Sophie Makhno, son directeur artistique de l’époque, Ta cigarette après l’amour marquera le départ du style intimiste de  » l’interprète  » Charles Dumont, mais il faudra attendre les années 70 pour que la chanson passe les interdits de 2 censures, l’une morale, l’autre anti-tabac et trouve sa place en radio et TV.

 

Toute en nuances, la carrière de Charles l’amènera, de disques d’or en music-halls, de tournées internationales en oeuvres inclassables, tels les Concerto pour une chanson et passion, à se trouver une place  » à part « , dans l’univers d’un show business où le business a pris le pas sur le show. Cette carrière, jalonnée de Disques d’Or et distinctions diverses, s’articule autour des battements du coeur de Charles et d’un public pour qui les modes n’ont qu’une médiocre importance au regard des saisons de la vie et de l’amour.

Parmi ses interprètes de la première heure aux plus récents, Marie-José, Lucienne Delyle, Bourvil (Notre amour est en grève), Sidney Bechet (Pourtant), Luis Mariano (El Guerillero), Annie Cordy (Pantaléon), Dalida (Gitane), Michel Legrand (Lorsque Sophie Dansait), Juliette Gréco (La Propriétaire), Willy DeVille (Les Amants), Jacques Brel (Je m’en remets à toi), Heltau (création allemande de Une Chanson), Mireille Mathieu (Les Gens qui s’aiment, Mon Dieu), Barbra Streisand (Le Mur) …

 

Gaston Monnerville

Gaston Monnerville est né en Guyane française, à Cayenne, le 2 janvier 1897. Excellent élève du collège de Cayenne, il est reçu, en 1912, au concours des Bourses Métropolitaines. Il quitte la Guyane et entre en classe de seconde, à Toulouse, au Lycée Pierre Fermat (Hôtel Bemuy).

Il s’y montra un élève particulièrement brillant, aussi doué pour les sciences que pour les lettres. Puis, étudiant aux facultés de lettres et de droit de Toulouse, il passe à la fois sa licence ès lettres et sa licence en droit, avec félicitations du jury.

C’est également avec félicitations du jury qu’il est reçu, en 1921, docteur en droit, après avoir soutenu une thèse sur  » L’enrichissement sans cause « . Cette thèse sera honorée d’une souscription du ministère de l’Instruction Publique et primée au concours des thèses.

 

Le fils d’Outre-Mer que je suis doit tout à la République. C’est elle qui, dans ma Guyane natale, est venue m’apporter la dignité et la culture. C’est elle qui m’a tout appris et qui a fait de moi ce que je suis. Tous les mouvements de liberté et de démocratie, à travers les temps et les pays, revêtent la même forme : l’instauration ou le respect de la loi.

L’avocat, l’homme de conviction et l’orateur

Dès 1918, Gaston Monnerville s’inscrit au Barreau de Toulouse. Reçu, en 1921, au concours des Secrétaires de la Conférence, il obtient la Médaille d’Or  » Alexandre Fourtanier » qui récompense l’un des meilleurs Secrétaires. A ce titre, il prononce, à une séance solennelle de rentrée, un discours remarqué sur  » La Critique et le Droit de Réponse « . Puis, il quitte Toulouse et s’inscrit, en 1921, au Barreau de Paris. Il entre bientôt au cabinet du célèbre avocat et futur homme d’Etat, César Campinchi (1882-1941), dont il sera, pendant huit ans, le principal collaborateur. En 1923, il est reçu au Concours des Secrétaires de la Conférence des Avocats, à la Cour d’Appel de Paris.

En 1927, il est élu Président de l’Union des Jeunes Avocats. Gaston Monnerville plaide dans plusieurs grands procès. Il s’illustre notamment en 1931, à l’âge de 34 ans, dans l’affaire  » Galmot « . Inculpés, après l’émeute provoquée, en 1928, par la fraude électorale et par la mort suspecte de Jean Galmot, quatorze Guyanais sont traduits devant la Cour d’Assises de Nantes. Avec d’autres avocats (Fourny, Zevaes et Torres), Gaston Monnerville assure leur défense. Sa plaidoirie produit un effet considérable sur les jurés qui se prononcent pour l’acquittement.

Les idées politiques de Gaston Monnerville se sont fixées très tôt et ont déterminé son engagement : il adhérera à la Grande Loge de France, militera dans les rangs du parti radical-socialiste et, toute sa vie, il consacrera une éloquence entraînante à exalter les Droits de l’Homme, à combattre le racisme et, plus tard, à défendre le bicamérisme et le Sénat. L’écrivain sera estimé, et surtout, l’orateur sera célèbre.

Le député de la Guyane (1932 – 1946) A la suite de l’affaire Galmot et du procès retentissant des émeutiers de Cayenne, ses compatriotes demandent, en 1932, à Gaston Monnerville de se présenter en Guyane contre le député sortant Eugène Lautier. Il est élu à une majorité considérable, au premier tour de scrutin, et il sera réélu de la même manière, en 1936, après avoir été élu maire de Cayenne en 1935. Il sera maire de Cayenne jusqu’aux élections de 1945, où il sera battu par Constant Chlore. Le sous-secrétaire d’Etat aux colonies Gaston Monnerville sera deux fois sous-secrétaire d’Etat aux Colonies en participant à deux cabinets successifs, l’un et l’autre présidés par Camille Chautemps (1885-1963), du 22 juin 1937 au 10 mars 1938.

La nomination d’un homme de couleur au Gouvernement ne fut appréciée ni en Allemagne, ni en Italie. Dans  » l’Azione coloniale  » du 22 juillet 1937, un article titré  » Derrière le Rouge du Front Populaire vient le Noir  » annonce la création d’un sous-secrétariat d’Etat aux Colonies  » confié au noir G. Monnerville  » et commente :  » La France a adopté une politique indigène qui, outre qu’elle est une folie pour la nation française elle-même, est un danger pour les autres nations de l’Europe, car cette action qui dépasse le cadre purement politique pour rencontrer le cadre biologique, doit être dénoncée à l’opinion publique mondiale, là où existe une race incontestablement supérieure à celle de couleur que la France voudrait implanter au coeur de l’Europe « . Dans le cadre de ces fonctions, Gaston Monnerville eut à traiter de deux dossiers importants : le fonds colonial et le conflit sino-japonais.

La Guerre

Lorsque la guerre éclate en septembre 1939, Gaston Monnerville est parlementaire, âgé d’un peu plus de quarante ans. Aux termes de la loi sur l’organisation de la Nation en temps de guerre, il n’est pas mobilisable. Mais il entend participer au combat. Avec plusieurs de ses collègues, il obtient d’Edouard Daladier un décret-loi (5 septembre 1939) qui les autorise à s’engager. Ce qu’il fait aussitôt (7 septembre 1939). Il servira comme  » Officier de Justice  » sur le cuirassé  » Provence « . Ce bâtiment participera à une croisière de guerre qui se terminera tragiquement à Mers-el-Kebir, le 3 juillet 1940. Gaston Monnerville sera alors démobilisé le 16 juillet. Durant toute cette croisière, Gaston Monnerville tiendra un important journal de bord (78 feuillets), illustré de nombreux croquis et photographies. Il y consigne, jour après jour, tous les traits marquants de la croisière : l’heure de départ, l’état de la mer, les étapes, les rives longées, les bâtiments d’escorte, la destruction d’un sous-marin… Gaston Monnerville est démobilisé le 17 juillet 1940. Il n’a donc pas pu prendre part au vote de l’Assemblée nationale (sous ce nom, on désigne alors la réunion du Sénat et de la Chambre des Députés), dans la fameuse séance du 10 juillet à Vichy.

Les historiens insistent sur le courage des quatre-vingts parlementaires, les fameux  » Quatre-Vingts  » (57 députés et 23 sénateurs), qui ont refusé les pleins pouvoirs à Pétain et ont sauvé l’honneur du Parlement, en refusant l’abaissement de la République. Mais ils oublient de rappeler que si Monnerville n’a pas fait partie des  » Quatre-Vingts « , c’est parce qu’il était engagé volontaire.

La Résistance

Dans ses Mémoires, Gaston Monnerville divise cette époque en deux périodes de résistance : – civile dans le Sud-Est (août 1940-décembre 1942), – militaire dans les maquis de Haute-Auvergne (jusqu’en septembre 1944). Démobilisé, Monnerville s’empresse de rejoindre son ancien patron, Campinchi, à Marseille, en août 1940. Ministre de la Marine, du 23 juin 1937 jusqu’à la formation du gouvernement Pétain, le 16 juin 1940, Campinchi avait été un farouche opposant à l’armistice. Préconisant la poursuite de la guerre en Afrique du Nord, il s’était embarqué, le 16 juin, sur le  » Massilia « . A son arrivée, il avait été arrêté, sur les ordres de Vichy, placé en résidence surveillée à Casablanca, puis à Alger, enfin à Marseille. Non plus que Monnerville, il n’a participé à la fameuse séance de Vichy. Tous deux partagent l’analyse qui est celle même du Général de Gaulle. La guerre ne fait que commencer ; et l’Allemagne sera vaincue. Mais Campinchi meurt le 22 juin 1941. Entre temps, Monnerville est allé protester à Vichy contre les premières mesures discriminatoires qui frappent  » les Juifs, les Arabes et les hommes de couleur « . Le maréchal répond de façon évasive ou dilatoire.

Déjà, les premiers réseaux de résistance se constituent. Monnerville entre en contact avec le capitaine Chevance et adhère au mouvement  » Combat « . En qualité d’avocat, Monnerville assure systématiquement la défense de ceux que  » l’Etat français  » emprisonne pour délit d’opinion ou d’origine raciale. Cette activité lui vaut d’être inquiété par la police et plusieurs fois arrêté. La  » zone libre  » envahie le 11 novembre 1942, Monnerville rejoint alors les maquis d’Auvergne. Il entre dans le groupe du commandant Cheval. Capitaine, puis commandant F.F.I., il y prend le pseudonyme de Saint-Just.

Gaston Monnerville et son épouse sont établis à Cheylade, dans le Cantal, du 7 décembre 1942 au 5 août 1944. Saint-Just sera un actif agent de liaison entre les réseaux de Lozère, d’Ardèche et du Gard. Le poste de commandement du groupe Cheval est établi au château de Mazerolles. (C’est là que Monnerville apprendra le débarquement en Normandie du 6 juin 1944). Les opérations s’intensifient à partir du début de 1944, lorsque le général Koenig, nommé commandant en chef des Forces Françaises de l’Intérieur, entreprend d’unifier les réseaux métropolitains. L’hospice civil de Cheylade sera réquisitionné par les F.F.I., pour servir d’hôpital militaire. La gestion et l’administration en sont confiées à Monnerville, activement secondé par son épouse (juin-juillet-août 1944). Enfin, Gaston Monnerville participe à l’opération du  » bec d’Allier « , du 7 au 10 septembre 1944. Il est démobilisé des F.F.I. à la fin de septembre.

L’Assemblée consultative provisoire et les deux constituantes

Début juin 1944, le Comité Français de Libération Nationale se transforme en  » Gouvernement provisoire de la République française « , sous la présidence du Général de Gaulle. L’Assemblée consultative provisoire, instituée par l’ordonnance du 17 septembre 1943, réunie d’abord à Alger, siège ensuite à Paris au Palais du Luxembourg, à partir du 7 novembre 1944. (Félix Gouin la préside). Monnerville en est désigné membre par la Résistance. Président de la Commission de la France d’Outre-Mer, il contribue à préparer, en concertation avec le Général de Gaulle, le futur statut et le cadre constitutionnel de l’Union Française. Lors de la séance du 12 mai 1945, il célèbre, au nom des populations de nos provinces lointaines, la victoire des Alliés. Son discours est un hommage vibrant aux soldats originaires de l’Outre-Mer, qui ont libéré la métropole.

Octobre 1945 : Premier référendum. L’Assemblée qui sera élue aura des pouvoirs constituants, mais limités. 8 novembre : L’Assemblée Nationale Constituante se réunit au Palais Bourbon. Elle élit son Président : Félix Gouin. Gaston Monnerville en est élu membre. 21 janvier 1946 : Le Général de Gaulle donne sa démission. Félix Gouin devient Président du gouvernement provisoire. 19 mars 1946 : Les quatre vieilles colonies françaises (Guyane, Martinique, Guadeloupe, Réunion) sont transformées en départements d’Outre-Mer. Gaston Monnerville a pris une part déterminante dans ce changement de statut. Il reprend également son ancien projet de création d’un fonds colonial et dépose, en ce sens, une proposition de loi en mars 1946. Le 30 avril, la loi créant le fonds d’investissement pour le développement économique et social des territoires d’Outre-Mer (F.I.D.E.S.) est votée.

5 mai 1946 : Deuxième référendum : les Français rejettent un premier projet -purement monocaméral – de Constitution. 11 juin 1946 : La deuxième Constituante se réunit au Palais-Bourbon. Monnerville en est à nouveau membre. Elle élit, trois jours plus tard, Vincent Auriol, Président de son Bureau.

13 octobre 1946 : Troisième référendum : cette fois, le projet de Constitution est adopté. Le nouveau texte n’est plus strictement monocaméral. La Constitution institue une seconde chambre : le Conseil de la République, élu au suffrage universel à deux degrés. Mais ses prérogatives sont réduites à un simple pouvoir d’avis. 10 novembre 1946 : Elections législatives à la première Assemblée nationale, en application de la nouvelle Constitution. Gaston Monnerville, qui se présente en Guyane, est battu par René Jadfard. Il est néanmoins élu quelques semaines plus tard au nouveau Conseil de la République, mais, précisera-t-il,  » en son absence et sans avoir été candidat « .

Le Conseil de la République et son Président (1946 – 1958)

Le Congrès se réunit à Versailles, le jeudi 16 janvier 1947. Vincent Auriol, Président de l’Assemblée nationale et, à ce titre, Président du Congrès, est élu Président de la République, par 452 voix ; Champetier de Ribes n’en recueille, lui, que 242. A l’assemblée du Luxembourg, Gaston Monnerville est l’un des trois Vice-Présidents désignés, dès le premier bureau définitif du 27 décembre. Il est confirmé, à ce poste, le 14 janvier. Gravement malade, Champetier de Ribes décède le 6 mars 1947. Le groupe M.R.P. se rallie à l’idée d’une candidature, peut-être plus  » technique  » que politique, et propose Gaston Monnerville qui, le 14 mars 1947 est élu au deuxième tour, par 141 voix, contre Henri Martel, qui en a obtenu 131. Le nouveau Président précisera, quelques jours plus tard, sa conception de la présidence et du rôle de la seconde chambre, dans une intervention qui sera très vivement applaudie.Les premières élections au Conseil de la République ont lieu le 15 décembre 1946. Gaston Monnerville est, en son absence, élu en Guyane. Il recueille les 10 voix des 10 votants de ce département. La nouvelle assemblée se réunit au Palais du Luxembourg, le mardi 24 décembre, et commence par procéder à la vérification des pouvoirs. Un premier bureau est élu, le 27 décembre. Au troisième tour, Auguste Champetier de Ribes (M.R.P., Président du Mouvement des Démocrates Chrétiens) est élu Président par 124 voix, contre Gaston Marrane (Président du Groupe communiste) qui en recueille 119. La session est aussitôt close. Le 14 janvier 1947, ce bureau est renouvelé. Au troisième tour, Champetier de Ribes obtient le même nombre de voix, 129, que son concurrent, Georges Marrane. Il est alors proclamé au bénéfice de l’âge. Deux jours plus tard, Champetier de Ribes sera également candidat à la présidence de la République.

Monnerville sera constamment réélu au fauteuil présidentiel, durant toute la décennie. Rappelons que, sous la IVème République, le bureau de la Haute Assemblée se présentait devant le suffrage des sénateurs non seulement à chaque renouvellement triennal , mais aussi, chaque année, au début de la session. Le Président du Sénat de la Vème République (1958-1968) Gaston Monnerville approuve le projet de Constitution de 1958. Il en a suivi de près l’élaboration. Un des principaux rédacteurs est le garde des Sceaux, Michel Debré, membre du Conseil de la République, qui entretient des rapports confiants avec son Président d’assemblée. D’autre part, plusieurs membres du Comité Consultatif Constitutionnel rendent compte régulièrement des séances de travail et des versions successives du texte. Contrairement à celle de 1946, la nouvelle Constitution est favorable à la Haute Assemblée, qui retrouve son nom de Sénat, son prestige et l’essentiel de ses anciens pouvoirs. C’est enfin une véritable assemblée qui vote la loi et contrôle le gouvernement. Le Président du Sénat voit avancer son rang protocolaire. En cas d’empêchement du chef de l’Etat, c’est lui qui assure l’intérim. Les voeux du bicamériste convaincu qu’est Monnerville ne peuvent qu’être comblés.

A l’époque, politologues et observateurs pensent que le pouvoir exécutif s’est ainsi donné les moyens constitutionnels de s’appuyer, en cas de besoin, sur le Sénat pour contenir une Assemblée nationale, rétive ou hostile. (En 1958, personne ne prévoit le fait majoritaire, qui s’affirmera quatre ans plus tard, et transformera les conditions de fonctionnement du régime). La Constitution de la Vème République comble également les voeux de Monnerville, dans l’autre domaine qui lui est cher : l’Outre-Mer. A la place de  » l’Union Française « , le nouveau pacte fondamental institue une  » Communauté  » rassemblant des pays, relativement autonomes, mais fortement liés à la France. Une assemblée spéciale est prévue : le Sénat de la Communauté. Gaston Monnerville en sera élu et réélu Président. Les débuts de la Vème République sont donc particulièrement prometteurs. Monnerville fera campagne pour les institutions nouvelles. Il expliquera dans ses mémoires comment et pourquoi viendront ce qu’il nomme  » ses premières désillusions  » : l’évolution de l’Outre-Mer, l’indépendance rapidement acquise par les anciennes colonies, l’ajournement indéfini du Sénat de la Communauté…, autant d’événements qui déçoivent celui qui, depuis tant d’années, rêvait pour la France, d’un système cohérent et stable, à l’égal du Commonwealth britannique.

degagnac

Inauguration à Dégagnac, le 15 avril 1962 aux côtés de Maurice Faure. Fonds Bouzerand

En septembre 1962, il est au premier rang de ceux qui s’opposent au Référendum instituant l’élection de Président de la République au suffrage universel. Il est réélu Président du Sénat le 2 octobre 1962 et encore le 2 octobre 1965. L’élu local du Lot Elu Président du Conseil de la République, Gaston Monnerville jugea rapidement que ses nouvelles responsabilités allaient le retenir très souvent à Paris et qu’il serait trop absorbé pour être en mesure de prendre régulièrement l’avion et suivre sur place les affaires de la Guyane.

L’échec aux législatives de 1946 l’avaient instruit des dangers de l’absence. Henri Queille en voisin et Maurice Faure sur place, lui suggèrent alors de se présenter dans le Lot. En novembre 1948, Gaston Monnerville fut élu haut la main sénateur de ce département. Puis il renforça son implantation, en novembre 1949, en devenant Conseiller général de Souceyrac. Il fut ensuite élu au conseil général en 1949, qu’il présida de 1951 à 1970. Il fut enfin élu maire de Saint-Céré de 1964 à 1971.

On doit noter que Monnerville a eu une carrière politique atypique car il n’exerça son premier mandat local qu’après avoir été élu au Parlement : c’est le député de Guyane qui devint maire de Cayenne ; pareillement c’est le sénateur du Lot qui, après 16 ans de mandat, devint maire de Saint-Céré. Certes son attachement au Lot fut, au début du moins, d’ordre intellectuel, mais, toujours scrupuleux, il fit honneur à ses engagements, aux prises avec tous les problèmes d’un département rural en cours de modernisation. Peu à peu se créa entre lui et le Lot en réel courant affectif, à côté du grand respect que lui valurent son dévouement et une urbanité non dépourvue de fermeté. Il dirigeait les débats de l’assemblée départementale comme ceux du Sénat, avec autorité, et connaissait bien les dossiers. Sous sa présidence, le Lot progressa notablement dans les domaines de la voirie, de l’adduction d’eau, des constructions scolaires, du tourisme…

A Saint-Céré l’oeuvre réalisée sous son impulsion réveilla une cité quelque peu endormie : un plan d’urbanisme, la création des « Rencontres Internationales », l’appui à Jean Lurçat… La solidarité des Lotois ne fit pas défaut à Gaston Monnerville à l’heure de sa disgrâce officielle subie par le président du Sénat, il y fut constamment et très largement réélu. Après avoir cédé la présidence du Conseil général à Maurice Faure en 1970, il continua jusqu’à un âge avancé, à participer aux manifestations locales, celles du part radical ou de la fédération des Maires du département.

Les dernières années Ayant renoncé, en 1968, à la Présidence du Sénat, Gaston Monnerville continue à exercer son mandat sénatorial pendant six ans. Puis, le 22 février 1974, Alain Poher, son successeur le nomme membre du Conseil Constitutionnel. Cette nomination surprit car, en 1962, Gaston Monnerville avait eu des propos durs lorsque le Conseil Constitutionnel s’était déclaré incompétent pour juger du référendum sur l’élection du Président de la République au suffrage universel.

Gaston Monnerville siègera 9 ans au Conseil, s’interdisant toute prise de position politique pendant cette période, estimant qu’il remplissait une fonction juridictionnelle. A l’issue de ce mandat, Gaston Monnerville a 86 ans. Il poursuit néanmoins ses activités, prononçant des conférences, participant à des émissions de souvenirs, ou signant quelques préfaces. Il décède à Paris le 7 novembre 1991, peu avant d’atteindre ses 95 ans. Grand homme politique, c’est aussi un peintre amateur de qualité qui s’endort, laissant pour témoignage de nombreuses toiles dont deux furent longtemps exposées à la Chantrerie de Cahors.

Ces textes et photographies sont extraits de : 10ème Anniversaire de la mort de Gaston Monnerville, Archives du Sénat, 2001, et de Gaston Monnerville, la passion républicaine, Conseil Général du Lot, juin 1999

 

Françoise Sagan

Françoise SAGAN, une jeunesse éternelle jamais sortie de la célébrité depuis un demi-siècle

Françoise Quoirez est née le 21 juin 1935 à Cajarc ( Lot) . Elle a une dizaine d’années quand la famille emménage à Paris, dans les beaux quartiers de la rive droite. Son père Pierre, un industriel, apparaîtra souvent dans ses interviews comme un excellent fournisseur de bons mots. Cela n’empêche pas une éducation des plus strictes et bourgeoises, dans un cadre chaleureux. «Mes parents m’ont protégée», a toujours dit Sagan. Elle entre au couvent des Oiseaux en 1947. Elle est renvoyée pour son « dégoût de l’effort ».

Elle rate le bac en 1951, après une année surtout consacrée à écouter du jazz à Saint-Germain-des-Prés où, plus tard, elle se liera à Juliette Gréco, Jean-Paul Sartre et tant d’autres. Adolescente, elle lit Gide, Camus, Sartre, Rimbaud, Proust. Elle commence à la Sorbonne des études de lettres qu’elle ne poursuivra pas. Elle signe Sagan (Pseudonyme inspiré de la princesse de Sagan dans « A la Recherche du temps perdu  » de Proust) en publiant, en 1954, son premier roman,

Bonjour Tristesse :

C’est l’histoire d’une jeune fille, Cécile, qui déteste la maîtresse de son père et qui ne sera pas étrangère au suicide de celle-ci. Sagan n’a pas encore vingt ans. Elle connaît un succès considérable (1 million d’exemplaires vendus en quelques semaines) et son livre est couronné par le prix des Critiques Pour la presse grand public, Sagan incarne alors la romancière « nouvelle vague ». En 1955 elle se rend à New York où son livre est traduit et y rencontre Truman Capote, puis elle part à Key West où elle verra Carson McCullers et Tennessee Williams, avec lequel elle se lie d’amitié : elle fera adapter à Paris sa pièce Sweet Birds of Youth.

Elle publie cette année-là son second roman : Un certain sourire. En 1957, Françoise Sagan est victime d’un grave accident de voiture qui lui vaut plusieurs semaines d’immobilisation. Elle publera en 1964, Toxiques, le journal. En 1957, paraît son troisième roman, Dans un mois dans un an. En 1958, elle épouse Guy Schoeller.

En 1959 ce sera Aimez-vous Brahms : le portrait sans complaisance d’une femme de quarante ans. Grâce à ce roman Françoise Sagan échappe aux pages « faits divers » des magazines et réussit à se faire respecter en tant qu’écrivain. En 1960 sa première pièce, Château en Suède, est créée au théâtre de l’Atelier.

Dès lors Françoise Sagan alternera romans et pièces de théâtre. Dans La Chamade ( 1965), Un peu de soleil dans l’eau froide ( 1969), Le Lit défait ( 1977), La femme fardée (1977) , on retrouve l’univers de Sagan : la fragilité des liens amoureux, l’ennui dans l’élégance , la bourgeoisie désabusée, les soirées arrosées et mélancoliques dans les boîtes de nuit, les fuites en avant en voiture de sport… Dans De guerre lasse ( 1985) et Chagrin de passage ( 1995) Françoise Sagan évoque en plus le thème de la mort.

Françoise Sagan a également écrit pour le théâtre : Un Château en Suède (1960), Les Violons parfois ( 1961), Le Cheval évanoui (1966), Il fait beau jour et nuit ( 1978), Un piano dans l’herbe ( 1994). Françoise Sagan a reçu en 1985 le prix de la fondation Prince Pierre de Monaco pour l’ensemble de son œuvre. Depuis longtemps, on avait un peu oublié ses livres pour ne retenir qu’une invraisemblable accumulation d’histoires qui n’ont fait que renforcer sa légende : goût immodéré pour la vitesse et l’alcool, cures de désintoxication, grave accident de voiture de 1957, casinos, prise assumée de stupéfiants, plèvre déchirée lors d’un voyage en 1985 en Colombie avec son ami, le président François Mitterrand, procès Elf où certains auraient tenté de lui faire jouer les espionnes etc.

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BIBLIOGRAPHIE DE L’ÉCRIVAINE : Françoise Sagan avait publié une cinquantaine de livres, dont une bonne partie parue chez Julliard. – « Bonjour Tristesse » (1954) – « Un certain sourire » (1956) – « New York » (textes, 1956) – « Dans un mois, dans un an » (1957) – « Aimez-vous Brahms » (1959) – « Toxique » (1964) – « La Chamade » (1965) – « Le Garde du coeur » (1968) – « Un peu de soleil dans l’eau froide » (1969) – « Des Bleus à l’âme » (1972) – « Il est des parfums » (1973, en coll. avec Guillaume Hanoteau) – « Les Merveilleux nuages « (1973) – « Un Profil perdu » (1974) – « Réponses » (1975) – « Des yeux de soie » (nouvelles, 1975) – « Brigitte Bardot » (1975) – « Musiques de scènes » (nouvelles, 1981) – « La Femme fardée » (1981) – « Un Orage immobile » (1983) – « Avec mon meilleur souvenir » (1984, mémoires) – « De Guerre lasse » (1985) – « Sarah Bernhardt, ou Le rire incassable » (1987) – « Un Sang d’aquarelle » (1987) – « Au marbre: Chroniques retrouvées, 1952-1962 » (1988) – « La Laisse » (1989) – « Les Faux-Fuyants » (1992) – « Répliques » (1992) –  » La Maison de Raquel Vega » (1992) – « Oeuvres » (1993) – « …Et toute ma sympathie » (1993) – « Un Chagrin de passage » (1994). – « Le Miroir égaré » (1996) – « Derrière l’épaule » (1998) Théâtre – « Château en Suède » (1959) – « Les Violons parfois » (1961) – « La Robe mauve de Valentine » (1963) – « Bonheur, impair et passe » (1964) – « Le Cheval évanoui » (1966) – « L’Echarde » (1966) – « Un Piano dans l’herbe » (1970) – « Zaphorie » (1973) – « Le Lit défait » (1977) – « Le sang des Borgia » dialogue et co-scénario avec J. Quoirez, 1978) – « Pol Vandromme » (1978) – « Il fait beau jour et nuit » (1978) – « Le Chien couchant » (1980) – « L’Excès contraire » (1987) Cinéma – « Aimez-vous Brahms » (scénario) d’Anatole Litvak (1961) – « Landru » (scénario) de Claude Chabrol, 1962) – « Les Fougères bleues » (mise en scène et scénario, 1976)

La fin de la saga Sagan « Je suis futile, mais la futilité consiste à s’occuper de choses intéressantes » avait-elle coutume de dire à François Mitterrand qu’elle recevait dans sa maison natale de Cajarc (Lot). Dans ses romans, Françoise Sagan racontait en effet avec légèreté les choses graves de la vie. Son irruption dans une Maserati rouge au cœur des événements de mai 1968 résume sans doute aussi les excès, l’oisiveté et le goût pour la provocation mondaine d’une personnalité qui, mèche blonde en bataille et cigarette au bout des lèvres, a incarné la France des années 1960 et 1970. « La gloire et le succès me délivrèrent très tôt de mes rêves de gloire et de succès » déclarait Sagan en évoquant « Bonjour tristesse », son premier roman, devenu un mythe littéraire.

De son vrai nom Françoise Quoirez, née le 21 juin 1935 dans une famille d’industriels fortunés, elle a tout juste 18 ans quand elle achève en sept semaines dans la maison de campagne de Cajarc, l’écriture du manuscrit qu’elle signe sous un pseudonyme emprunté à l’œuvre de Marcel Proust. Des millions d’exemplaires sont vendus à travers le monde (un million aux Etats-Unis) et toute une génération se passionne pour Cécile, l’héroïne éprise de liberté et hantée par la solitude, dont le destin s’achève tragiquement sur une route.

LA PEUR DE LA SOLITUDE, L’ANGOISSE DE LA NUIT

C’est justement après un accident de voiture en 1957 que bascule la vie de l’écrivaine. Ses fresques littéraires, plus appréciées du public que de la critique et des jurys de concours, attirent moins l’attention que ses frasques mondaines. Passion immodérée pour la vitesse, voyages dans les paradis artificiels revendiqués, cures de désintoxication, fraude fiscale qui lui a valu une condamnation pénale un an après avoir écopé d’une autre peine pour trafic de stupéfiants, apparition dans l’affaire Elf…

Cette vie sulfureuse et effrénée de jet setteuse cynique, les dépenses sans compter d’une fortune colossale, sont pour elle une arme contre une timidité maladive qui la fait bredouiller devant les micros et une angoisse de la nuit qui ne la quitte pas depuis son séjour au pensionnat du couvent des Oiseaux en 1947. D’ailleurs, si elle n’obtient pas son bac en 1951, c’est qu’elle préfère écouter jusqu’à l’aube du jazz et Juliette Greco à Saint-Germain des Prés et Sartre au café de Flore. Ils deviendront ses compagnons parisiens. A ses maris, l’éditeur Guy Schoeller et l’Américain Bob Wetshoff, père de son fils Denis, elle préfère ses amis, intellectuels, bringueurs ou politiques (de gauche).

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SES ÉTÉS À CAJARC

Mais plutôt qu’à Saint-Tropez, c’est à Cajarc qu’elle passe le mois d’août. Françoise Sagan a largement contribué à la renommée de cette bastide lotoise blottie au cœur de son méandre. Rituellement, François Mitterrand rendait visite à l’écrivaine sur les bords du Lot. « Elle est tout simplement saganesque » commentait Mitterrand à son propos. Lecteur assidu de l’œuvre et fasciné par une personnalité qui correspondait sans doute à l’idée qu’il se faisait de la vie et de l’être humain, il la conviait régulièrement dans le cercle de ses amis littéraires et dans ses déplacements. Elle a d’ailleurs failli laisser la vie en Colombie en 1985 lors d’un voyage présidentiel, victime d’un décollement de la plèvre. A partir de cette époque, ses oeuvres rencontrent moins de succès. Ses déficiences pulmonaires et chaque disparition d’ami l’affectent tout autant. Malade, ruinée, plus présente à la chronique judiciaire qu’à la rubrique mondaine, elle vend ses biens, se fait héberger par ses amis et doit sa liberté à des protections politiques.

En 1998, elle publie son dernier livre (Derrière l’épaule). En dehors de ses fans, il passe inaperçu. Elle s’est éteinte ce 24 septembre 2004 à Honfleur à 69 ans, victime d’une embolie pulmonaire, achevant sa lutte contre la solitude. Le chef de l’Etat, de nombreuses personnalités de droite comme de gauche ainsi que du monde littéraire ont salué cette « figure éminente », « flamboyante et mélancolique ». Pascal Jalabert – La Dépêche du Midi, 25/09/2004

MARDI 28 SEPTEMBRE 2004

Ses proches, amis et voisins ont rendu un dernier hommage à Françoise Sagan. L’écrivain a été inhumée mardi après-midi dans le petit cimetière du hameau de Seuzac, où se trouve le caveau de sa famille, à quelques kilomètres de sa ville natale de Cajarc (Lot), en présence d’environ 200 personnes. Le gouvernement français était représenté par le ministre de la Culture et de la Communication Renaud

1987

Donnedieu de Vabres et la ministre de l’Egalité et de la Parité professionnelle Nicole Ameline. Juliette Greco, Pierre Bergé, l’écrivain Bernard Frank étaient aussi venus rendre un dernier hommage à celle qui fut célèbre dès l’âge de 19 ans avec son roman « Bonjour tristesse ». Aux côtés de son fils Denis Westhoff et de sa soeur Suzanne, une cinquantaine de personnes parmi les plus proches amis et habitants du hameau avaient pu pénétrer dans l’enceinte du cimetière.

Sous un doux soleil, un brève bénédiction religieuse a précédé l’inhumation de Françoise Sagan. Celle-ci repose désormais dans une tombe à côté d’une de ses plus proches amies, face au caveau où sont enterrés ses parents et son frère Jacques Quoirez. Brigitte Bardot, qui n’a pu se rendre aux obsèques à cause de son état de santé, a estimé que Françoise Sagan a été « terrassée par la maladie et les impôts ». Elle confie que Sagan et elle « étaient comme deux soeurs jumelles reliées par nos destins ».

Christian Signol

Christian Signol est né en 1947, aux Quatre Routes, un hameau du Quercy blotti au pied des causses de Martel et de Gramat.

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Le petit garçon mène une existence heureuse entre ses parents et ses grands-parents. Son univers s’étend de l’école communale (dont il dévore la bibliothèque) à la campagne environnante. Les moissons, les vendanges, la cueillette des champignons, les parties de pêche l’été sur la Dordogne sont autant de «bonheurs d’enfance».

A onze ans, il est mis en pension au lycée de Brive. Il vit comme un drame cet éloignement du pays natal. Il dira plus tard : Cette déchirure a fait de moi un écrivain. Après des études universitaires de lettres et de droit, Christian Signol débute dans la vie professionnelle comme rédacteur administratif à la mairie de Brive.

Christian Signol est, avec Claude Michelet, l’écrivain le plus populaire de l’Ecole de Brive. C’est en 1984 qu’il a publié son premier livre, Les Cailloux bleus. Au rythme d’un roman par an ensuite (dont la magnifique trilogie de La Rivière Espérance), il a bâti une œuvre baignée par le parfum de la terre.

Il est heureux de se dire l’héritier d’une longue ligne de gens courageux et fiers, originaire du Périgord par son père et du Quercy par sa mère. D’où des personnages d’une ampleur et d’une sincérité plus vraies que nature où le poids naturel des racines écrase les modes et le parisianisme le plus frelaté.

+ d’information sur Wikipédia

«Homme de terroir, Christian Signol anime son pays d’une vie qui doit autant à la terre elle-même, à ses couleurs, à sa lumière, au cortège charnel de ses courbes et de ses senteurs qu’aux hommes, aux familles, aux métiers dont il sait la peupler. Ce contour insuffle aux destins anonymes, une ampleur et une sincérité, une humilité, aussi, qui sont des choses rares. C’est cet art du simple et du vrai, ce poids naturel des racines qui font le charme et le succès de ses livres.»

Le Figaro

 

La statue de Gambetta

La statue de Gambetta à Saigon ?

 

La statue de Gambetta a aussi été placée à Saigon Place Gambetta

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La statue de Gambetta, la même que celle qui est à Cahors, avait été installée à Saïgon.

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Voici la carte postale la représentant. Je me suis rendu à Saïgon/Hô Chi Minh Ville récemment, je l’ai cherchée, je ne l’ai pas trouvée. Je pense qu’elle a été déposée et sans doute fondue… Sic transit…

JB, mai 2005

Célébrité du Pont Valentré

En 1943, pour accompagner le Débarquement, l’armée américaine a édité un petit ouvrage de 64 pages pour initier les soldats US au langage français.

Du genre : Do you understand? = KAWN-pruh-nay VOO? pour : Comprenez-vous?

Mais ce qui intéressant c’est que ce guide comporte 5 illustrations de monuments français : la Tour Eiffel, le Panthéon, l’Arc de Triomphe, une église et….LE PONT VALENTRE.

Amusant non ?      Bouzerand, septembre 2004

 

Les débuts de l’imprimerie à Cahors

Les débuts de l’imprimerie, à Cahors, ne sauraient être antérieurs à 1583, contrairement à de tenaces légendes. Les biographes quercynois citent Jacques Rousseau, imprimeur itinérant venu d’Anjou, comme le premier imprimeur de Cahors.

La bibliothèque municipale possède une copie d’un ouvrage dont l’original se trouve à Londres, signé « à Caors par Jacques Rousseau ». Il est daté de 1586, le thème est l’historique de Cahors. Pourtant, cette ville était dotée d’une université. Mais ses professeurs étaient obligés, comme le professeur Dominici, de publier à Paris.

LES GRANDES DYNASTIES D’IMPRIMEURS CADURCIENS

L’imprimerie cadurcienne prit rapidement son essor avec de véritables dynasties d’imprimeurs, telle celle des Rousseau puis les Bonnet, les Richard, couvrant les XVIIe et XVIII, siècles, à coté d’imprimeurs « météores » au nombre d’une douzaine.

(1549-1656) La dynastie ROUSSEAU : Jacques Rousseau est le fondateur d’une véritable dynastie d’imprimeurs cadurciens. Il est nommé imprimeur de l’université et de la ville de Cahors. A sa mort, son fils Claude prend la succession. Celui-ci imprime des manuels scolaires pour le collège des Jésuites à partir de 1604. Sa femme continue l’impression jusqu’à ce que son fils puisse prendre la relève sous l’appellation «Veuve de Rousseau ». L’héritier, André Rousseau, n’ayant pas de fils, vend son imprimerie le 4 juillet 1656. (1614-1683)

La dynastie DALVY : Le premier de cette dynastie est Jean DALVY qui était fils de libraire. Il exerce une activité d’imprimeur de 1614 à 1640. C’était un notable de la ville de Cahors dans laquelle il s’était établit vers 1600. Il fut même consul (conseiller municipal) et eut le privilège d’être le libraire et l’imprimeur de l’évêque de Cahors. Son fils, Pierre DALVY (1621-1683) rachète l’atelier d’André ROUSSEAU, à son principal concurrent, le 4 juillet 1656. (1636-1698)

La dynastie RICHARD : Le premier de la dynastie est Georges RICHARD dont le premier ouvrage connu a été publié en 1681. Sa seconde femme est fille d’imprimeur. Ses enfants François et Pierre lui succèdent. Sa fille, Hélène, épouse un imprimeur de Carcassonne venu s’établir à Cahors. (1668-1694)

La dynastie BONNET : Le premier de la dynastie est Jean BONNET. Associé de Pierre DALVY, il lui succède vers 1660. Son fils François prend la relève en 1685. C’est ensuite le second fils, le libraire Arnaud, qui rachète l’atelier. Le nom de BONNET disparaît du corps des imprimeurs au début du XVIIIème siècle.

ÉVOLUTION DE LA PRODUCTION CADURCIENNE AU COURS DES SIECLES

La majorité des livres produits au XVIIe siècle, soit 432 pièces ou titres et 35 000 pages, relève de la littérature religieuse : celle qui se voulait un instrument de la réforme catholique inspirée par le concile de Trente. L’épiscopat cadurcien, avec d’aussi fortes personnalités qu’Alain de Solminihac, se place tout naturellement au premier rang des clients des imprimeurs.

Ceux-ci dépendent donc de ses commandes pour leur survie. A peu de distance, des écrits huguenots sortent en masse des imprimeries montalbanaises. L’administration, la littérature, les sciences viennent loin derrière avec 3% seulement chacune des pages imprimées. Une seule oeuvre imprimée, bien audacieuse pour son temps, échappe au conformisme de rigueur, « Scatabronda » (1697) : celle-là même que Patrick Ferté exhuma et étudia en 1983. On y critiquait les juges, le clergé ; on y revendiquait des droits pour les femmes et pour la langue locale, l’occitan !

Journal du Lot, août 1941

Le XVIIIe siècle connut un notable ralentissement dans l’activité des imprimeurs: trois fois moins de pages, avec bien moins de gros ouvrages. A ce moment Cahors est supplanté par les villes voisines, alors qu’elle les devançait, sauf Montauban, au XVIIe siècle. Ainsi Rodez, au XVIIIe siècle, publie trois fois plus de pages que Cahors et travaille parfois pour nos évêques. Cela correspond bien à la crise de langueur qui affecta alors Cahors et le Quercy, privés de leurs Etats, de la Cour des Aides et enfin de l’Université (1751). Aucune Académie ou société littéraire ne s’y créa. Il faut souligner le paradoxe que constitue l’absence de liens entre l’imprimerie cadurcienne et l’Université qui ne fut jamais, à la différence du collège des jésuites, cliente et soutien des imprimeurs locaux : cela ne laisse pas de surprendre et confirme le déclin de l’institution, ce qui, par ailleurs, n’est pas propre au seul Quercy.

Il faudra attendre le XIXe siècle et un courant libertaire fort, pour qu’intervienne le renouveau de l’imprimerie cadurcienne . Au début du XIXeme siècle, on ne faisait état que de deux imprimeries à Cahors. Au début du XXème, on mentionne sept imprimeurs dont l’imprimerie Coueslant (devenue aujourd’hui Imprimerie France Quercy), et l’imprimerie Brassac (qui deviendra imprimerie Besse, puis Dhiver, et aujourd’hui Cahors Imprimerie).

Ancienne imprimerie Laytou l’imprimerie Couslant est achetée en 1897 par Auguste Coueslant jeune Maître-Imprimeur huguenot du Vigan (Gard). Un incendie la détruit totalement en janvier 1912. En 1928, elle est de loin la plus importante, puisqu’elle compte presque 150 salariés. Dans les années 60, l’imprimerie cadurcienne compte une dizaine d’entreprises, mais l’imprimerie France Quercy reste néanmoins l’établissement le plus important.

Sources : - BSEL, 4e fasc. 2001, T. CXXII, oct.-déc., p. 342-343, compte-rendu d'Etienne Baux sur la conférence de Patrick Ferté : "l'imprimerie cadurcienne, miroir de la contre-réforme". - Compte-rendu par Claire Ligier, Académie de Toulouse, Lycée Clément Marot, PAE. - Cahors, une jeune ville de 2000 ans, Alexandre Marciel, Publifusion Editeur. - Imprimerie France Quercy.

14-18.lot.fr

Le site Internet 14-18.lot.fr , créé par le Département du Lot, vient d’ouvrir. Ce site a pour vocation de rassembler les nombreuses initiatives lotoises liées à la Grande Guerre mais aussi de présenter les histoires singulières de poilus et de leur famille qui ont subi cette tragédie.

Au travers de témoignages, d’illustrations d’époque, des photos des monuments aux morts, de reproductions de courriers, de vidéos, de contributions de spécialistes, ce site invite à se replonger dans ce qui fut l’une des périodes les plus sombres de notre Histoire.

Rappelons que le Lot, département rural, a été durement saigné lors de la Grande Guerre: 8 000 poilus sont morts durant cette période. A ce chiffre, il faut ajouter tous ceux qui sont décédés des suites de leurs blessures. De très nombreux Lotois et communes se sont mobilisés ces derniers mois pour leur rendre hommage.

Si vous aussi, vous souhaitez partager un sujet sur 14-18, une initiative, un témoignage, des documents, des photos, vous pouvez les déposer sur ce site 14-18.lot.fr. Ce site est à vous, faites le vivre.

Jacques DUEZE, pape sous le nom de Jean XXII – (Cahors 1245 – Avignon 1334)

Jacques Duèze (ou d’Euze) est né à Cahors vers 1245, d’une famille de banquiers. L’évêque de Toulouse lui ouvre la voie vers la cour de Rome. Jacques Duèze a étudié le droit canon et le droit civil à Paris et Orléans. En 1299, il est nommé évêque de Fréjus. En 1309 il devient chancellier de Charles II de Naples et est nommé en 1312 Cardinal de Porto.

La renommée de cet homme de bien, contribue à son élection à la papauté en 1316, mettant un terme à la longue querelle de succession au pape Clément V. Le 7 août 1316 il succède au Pape Clément V et transfère définitivement la cour papale en Avignon. Jean XXII est élu en raison de son grand âge, 72 ans, qui ne le prédestinait qu’à un règne « intérimaire ». Ancien évêque d’Avignon, c’est tout naturellement qu’il s’y installe, et, malgré son intention de ramener la papauté à Rome, il y restera jusqu’à sa mort, 18 ans après.

Deuxième pape à régner en Avignon (de 1316 à 1334). Il a contribué à centraliser l’administration de l’église, condamné les « Franciscains spirituels » et réaffirmé l’autorité papale lors des élections à l’empire d’Autriche.

Pendant cette première période, de 1309 à 1376, sept papes se succèdent à Avignon : Clément V, Jean XXII, Benoît XII, Clément VI, Innocent VI, Urbain V et Grégoire XI. Ces années vont radicalement transformer la ville et la marquer d’une empreinte à laquelle elle doit encore sa renommée mondiale.

Jean XXII participe à la prospérité de l’Église et rétablit la doctrine catholique sur le droit de propriété. Son action incessante le conduit à fonder les universités de Cahors et de Cambridge, à évangéliser l’Afrique et la Chine, à partir en croisade contre les Turcs. Cependant, les besoins financiers grandissent, et le système de fiscalité qu’il inaugura jeta le discrédit sur la papauté en Avignon.

Dès le début de son pontificat, Jean XXII prend parti dans le conflit ancien qui oppose deux factions dans l’ordre des Franciscains : les « Spirituels », qui prônent une adhérence stricte aux règles de pauvreté de Saint François, et les « Conventuels », qui ont une approche plus large. Il soutient les Conventuels et persécute les Spirituels qui s’opposent à lui. Plus tard, il condamnera toute la théorie de la pauvreté évangélique dans deux décrets : « Ad Conditorem Canonum » (1322) et « Cum Inter Nonnullos » (1323), utilisant des preuves tirées de l’écriture pour démontrer que le Christ et les apôtres auraient possédé des biens temporels.

Jean intervient également dans la querelle qui oppose Louis de Bavière (l’empereur Louis IV) et Frédéric d’Autriche pour la couronne du Saint Empire Romain Germanique. Il excommunie Louis de Bavière mais le 18 avril 1328, celui-ci fait déposer Jean XXII à Rome. Le franciscain Pierre de Corbara (Pietro Rainalducci) est alors élu antipape sous le nom de Nicholas V et est excommunié par Jean XXII.

Ancien évêque d’Avignon, c’est dans cette ville qu’il s’installa, comme deuxième pape, de 1316 à 1334. Jean XII participe à la prospérité de l’Église et rétablit la doctrine catholique sur le droit de propriété. Au cours de son pontificat, Jean XXII contribue à promouvoir l’activité missionnaire en Asie. Il crée des évêchés catholiques en Anatolie, en Arménie en Iran et en Inde. Il fonde une bibliothèque pontificale à Rome et une université à Cahors et à Cambridge, il contribue à évangéliser l’Afrique et la Chine, il part en croisade contre les

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Cahors, la Tour dite du Pape Jean XXII

Turcs. Cependant, les besoins financiers grandissent, et le système de fiscalité qu’il inaugura jeta le discrédit sur la papauté en Avignon.

Il contribue également à à fortifier diverses places fortes afin de protéger les alentours de la cité papale. De son pontificat datent le surhaussement du donjon féodal et les fortifications de l’église de Saint-Laurent-des-Arbres.

Successeur de Clément V (qui prit une part active au démantèlement de l’Ordre du Temple sous le règne de Philippe Le Bel), Jean XXII aurait fait partie, officieusement, du premier groupe d’hommes qui fondirent les légendaires Frères Aînés de la Rose Croix (F.A.R.+C.). Roger CARO, dans son Legenda, montre avec force détails, comment Jean XXII fut initié au Grand Art par ce dernier groupe de Templiers, révélant son intérêt pour la « Chimie de Dieu ». Dans les deux traités « L’Elixir des Philosophes » et « L’Art Transmutatoire », Jean XXII nous délivre ses connaissances très détaillées et nous lègue ainsi le témoignage opératif d’un alchimiste du 14e siècle.

Sur son lit de mort, Jean XXII doit rétracter les propositions énoncées lors de ses derniers sermons. Il mourut le 4 décembre 1334 laissant la mémoire du plus grand pape d’Avignon. Il fut le 194e pape.

Pierre Duèze, frère de Jean XXII, avait fait édifier vers 1322 un palais situé en haut de la ville. Une tour des remparts, construite le siècle précédent, y fut incluse. Cette tour s’orne de fenêtres du XIVeme siècle

Autres sites internet :

Jean XXII (Wikipédia)

Jean XXII (Compilhistoire)

Uc de Saint-Circ, un père de la Renaissance Italienne

Uc de Saint-Circ est né à Thégra à la fin du XIIème siècle. Son père, petit vavasseur (1), avait dû quitter son château de Saint-Cirq (graphie actuelle) situé sur l’actuelle commune de Couzou, sans doute ruiné par Henri Court-Mantel lors du sac de Rocamadour en 1183. Pour éviter une copropriété des biens familiaux (selon la coutume occitane, cadet d’une nombreuse fratrie, il était copropriétaire de ses biens avec ses frères) ses frères l’envoient étudier à Montpellier où on le destinait à l’état de Clerc.

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Château de Saint-Cirq (graphie actuelle)

Rappelons que Montpellier, alors sous la domination des rois d’Aragon et de Majorque, était une ville universitaire très importante où se retrouvaient de nombreux quercynois. Inversement, les professeurs de Montpellier enseignaient à l’Université de Cahors. Dans la capitale culturelle des rois d’Aragon où l’apport scientifique des musulmans et des juifs est important, Uc a pu acquérir, au moins en partie, les trois premières branches du savoir, le trivium : grammaire (latin classique), rhétorique et logique. Mais il ne devient pas clerc, il se fait jongleur et entre au service du comte de Rodez, du vicomte de Turenne et du bon dauphin d’Auvergne. Il sert de lien entre ces trois puissantes. Très tôt, il devient troubadour, nous dirions aujourd’hui, auteur-compositeur, un intellectuel profane du Moyen Age.

On le retrouve en Gascogne, auprès de Savaric de Mauléon, de la comtesse de Bénauges, en Poitou puis en Aragon et en Castille. En Provence enfin, d’où il gagne la Marche de Trévise vers 1220. Là il prend épouse et dernière date connue de sa vie, est accusé d’hérésie et d’usure en 1257 (Cathare ou bien Cahorsin ?). En Italie du nord, son rôle est fondamental dans la gestion de la Renaissance. Exilé, faidit, il apporte à sa patrie d’adoption le texte troubadouresque. Sur place il crée des vidas, premières biographies de troubadours marquées par la nostalgie d’un temps heureux, d’un pays perdu et remis dans le droit chemin obscurantiste par la ruée des croisés. C’est le point de départ, en Europe, de la critique littéraire en langue vulgaire et de la nouvelle en prose. Il y a un suivi des vidas au Novellino anonyme puis à Boccace et jusqu’à nos jours.

Uc est ainsi devenu, en Italie, un poéticien, un maître du trobar et plus encore, selon l’expression de Robert Laffont : « Le grand témoin de l’Occitanie en Italie ». Il ne nous reste qu’une cinquantaine de textes écrits par Uc et trois musiques qui permettent d’entrevoir un musicien de talent. Son œuvre est un « roman vécu ». Enfin, nous savons depuis peu, grâce aux travaux de Saverio Guida de l’université de Messine, qu’Uc de Saint-Circ et Uc Faidit sont une seule et même personne. Uc Faidit écrit vers 1240 le Donatz proençals, une grammaire, un traité de versification suivi d’un dictionnaire des rimes. Deux versions : une en oc et l’autre en latin. L’ouvrage est novateur (les exemples sont créés et non empruntés) et permettra à Dante, en différenciant le volgare du latino, de promouvoir l’italien moderne.

Depuis quelques années, l’Association Thégra Animation fait revivre Uc de Saint-Circ à travers un son et lumière retraçant sa vie et lui a consacré un colloque en 1998. Un cd de Gérard Zuchetto a été enregistré dans l’église de Thégra.

D’après : Anthologie des Poètes du Quercy, par Gilles Lades, éditions du Laquet et Encyclopédie du Lot, Bonneton.
Auteur : Gaston Bazalgues, Encyclopédie Bonneton, 2000

(1) VAVASSEUR, subst. masc. C’était le vassal d’un autre vassal, ou celui qui tenait un fief d’un vassal qui relevait lui-même d’un seigneur. D’autres historiens entendent que Vavasseur était une dignité immédiatement au-dessous de celle de baron.

Luctérius, première grande personnalité qu’aient connu les terres du Quercy…

Premier siècle avant J.-C., Lucterios (aussi connu sous la version latinisée Lucterius) est le dernier chef gaulois à résister à Jules César. Un an après la reddition de Vercingétorix à Alésia, Lucterios et Drappès se réfugient dans l’oppidum d’Uxellodunum où eut lieu la dernière bataille de la guerre des Gaules, en 51 avant J.-C. Il trouve refuge chez le chef arverne Epasnactos, qui le livre à César. Wikipedia

Lucterius est le nom du véritable Abraracourcix, c’est-à-dire du véritable dernier chef gaulois qui résista à César. Son retranchement ne s’appelait pas Petitbonum mais Uxellodunum. Il n’était pas en Bretagne mais dans le Quercy. En plus de ces légers détails et pour tout le reste il ressemble plus à Asterix : il était courageux, volontaire, plein de bonnes idées, sans peur et sans reproche. La ressemblance avec la bande dessinée est d’ailleurs si forte que, aussi incroyable que cela paraisse, les disputes en Quercy n’en finissent pas pour savoir exactement où était situé l’oppidum d’Uxellodunum.

Gravure représentant Uxellodunum comme on se l’imaginait au XVIème siècle.

La première grande personnalité qu’aient connu les terres du Quercy est sans nul doute Luctérius. A l’époque où vécut Luctérius le Quercy n’existait pas sous ce nom du moins, c’était le pays des Cadurques, nom du peuple qui habitait ces terres. Luctérius s’est grandement distingué durant les deux dernières années de la guerre des Gaules, mais ne semble pas être reconnu à sa juste valeur par les historiens lotois. Il fit pourtant preuve d’ héroïsme sur le territoire même du Quercy. Nous savons que Luctérius vécut durant le premier siècle avant J.C., et nous connaissons ses agissements grâce aux témoignages de César ainsi que d’Hirtius (compagnon de César), qui sont relatés dans les livres VII et VIII de la Guerre des Gaules (Bello Gallico).

Luctérius était issu du peuple des Cadurques, qui occupé approximativement le territoire de l’ancienne province du Quercy. Il fut une des grandes figures de la Gaule un allié de Vercingétorix et vraisemblablement, également un ami. Son peuple, les Cadurques furent en effet parmi les premiers à répondre à l’appel à la rébellion de Vercingétorix. Le grand César lui-même se méfiait de Luctérius dès le début de la révolte gauloise, qualifiant le chef Cadurque d’être un homme « d’une extrême audace ».

On sait que Vercingétorix l’envoya dans le territoire des Rutènes, peuple voisin des Cadurques, sur qui il devait avoir une certaine influence, le livre VII de la guerre des Gaules nous rapporte ceci : « Luctérius le Cadurque qui avait été envoyé chez les Rutènes les gagne aux Arvernes. Bien mieux il trouve de nouveaux alliés dans son voisinage : les Gabales du Gévaudan et les Nitiobriges de l’Agenais. Puis ayant réuni une forte troupe il entreprend d’envahir la Province en direction de Narbonne ». Il contraint César qui revenait d’Italie, à rejoindre Narbonne où il fit fuir ses troupes .

Puis, bien qu’il ne soit pas nommé, on peut déduire que Luctérius ait été présent à l’assemblée de Bibracte, qui se déroula après le succès de Gergovie. Vercingétorix décida alors d’empêcher César de rentrer en Italie, et distribua alors les règles à chacun. « Il envoie les Rutènes et les Cadurques ravager le pays des Volsques Arécomiques ». Luctérius descendit donc une nouvelle fois vers la Province romaine.

Mais la suite des événements perturba les plans Gaulois. Vercingétorix se retrouve encerclé dans Alésia et effectue un appel, 12.000 hommes sont alors réclamés aux Rutènes, 35.000 aux Cadurques, afin de former une armée de secours capable de libérer les assiégés d’Alésia.

Luctérius fut donc vraisemblablement présent au siège d’Alésia, puisque l’on nous dit qu’il en a « gardé un douloureux souvenir », au moment où il prépare la ville d’Uxellodunum à ce qui sera l’ultime siège mené par César en Gaule.

Uxellodunum, les irréductibles

Après la déroute d’Alésia, notre chef Cadurque, ne désarma pas, et continua à vouloir résister à l’envahisseur. Luctérius, s’associe alors à un autre chef rebelle, Drappès de Sens, à eux deux, il vont vivre les derniers moments de la lutte pour l’indépendance gauloise. En 51 avant J.C., les deux chefs gaulois Drappès et Luctérius sortant de l’enfer d’Alésia, vont prêter main-forte à Dumnacos qui se bat du côté de Poitiers. Ils subissent là une nouvelle défaite par Labiennus, mais rassemblent quelques 3000 rescapés ils descendent dans le sud. Mais, poursuivis par Caninius et ses deux légions, ils s’enferment dans la ville d’Uxellodunum qui se situait dans le pays des Cadurques.

bataille_uxell

Enluminure médiévale origine BNF représentant la bataille d’Uxellodunum

Luctérius, qui eut autrefois cette ville dans sa clientèle, gagna facilement les habitants à sa cause. Les deux chefs, décidèrent alors d’aller faire de grandes provisions de blé, afin de pouvoir tenir un long siège. C’est lors d’un des convois pour introduire du blé dans la place, que la troupe de Luctérius est surprise. Tous les Gaulois furent alors massacrés, seul Luctérius et quelques hommes purent s’enfuir. Les hommes de Drappès furent également défaits. Drappès fait prisonnier, honora sa mort en ajoutant volontairement la privation de toute nourriture aux douleurs que lui causaient les fers dont il était chargé, il se laissa mourir en peu de jours. Fabius et deux légions, puis César lui-même avec toute sa cavalerie ainsi que Calénus avec deux légions vinrent continuer le siège Uxellodunum où il ne restait plus que deux mille défenseurs dépourvus des deux chefs emblématiques Drappès et Luctérius.

Les Gaulois était bien pourvus en vivre, César résolut donc de les priver d’eau. Portant des archers, des frondeurs et des machines de guerres sur la rive gauche de la rivière qui entourait presque toute la montagne sur laquelle la ville était juchée et en face des pentes plus aisées, les Gaulois ne possédaient plus pour s’approvisionner en eau qu’une source au nord de la place qui coulait au pied du mur de celle-ci. César fit construire une terrasse (agger) de 18 m, une tour de 10 étages du haut de laquelle de l’artillerie empêchait les Gaulois de sortir de leurs murs. Par des tranchées couvertes et des galeries sous roche, les Romains parviennent à tarir la source et les Gaulois se rendirent. César fit couper les mains à tous ceux qui avaient porté les armes et se fit livrer Lucter par Epasnactos. Drappès lui se laissa mourir de faim.

Quant à Luctérius, qui était parvenu à s’enfuir, il fut livré à César par le chef Arvernes Espagnactos

Jacques-Joseph Champollion rappelait dans son ouvrage « Nouvelles recherches sur la ville gauloise d’Uxellodunum », que « les auteurs romains avaient écrit de ces deux chefs Gaulois que ce qu’ils ont cru dire de défavorable à leur mémoire. » Le même auteur écrivit sur Luctérius, que son « sort variable des armes le ramenant dans son propre pays, il y rendit ses compatriotes témoins de ses derniers efforts pour l’indépendance des Gaules, et vint, chargé de chaînes, expier, en présence de César, son inutile courage. »

Jacques-Joseph Champollion constatait avec regret, au sujet de Luctérius le Cadurque, qu’ « aucun monument public n’en consacra le souvenir ; l’empire des vainqueurs ne pouvoit le permettre ». Champollion l’aîné, découvrit néanmoins une inscription latine inédite qui se trouvait à Pern, sur une pierre de marbre servant de marche pied à l’autel. L’inscription en beaux caractères romains laissait lire : MARCO LUCTERIO. Champollion Figeac, alors accompagné de M. Lacoste (Hist. de la province Quercy en 4 vol.) purent déchiffrer la précieuse pierre, qui indique que ce monument fut élevé par la cité des Cadurci à Marc Lucter, surnommé Lion, fils de Lucter surnommé Senicianus, qui avait exercé toutes les charges publiques dans sa patrie, et qui était alors le prêtre envoyé par la même cité pour desservir l’autel dédié à Auguste, situé au confluent de la Saône et du Rhône, à Lyon.

Jacques-Joseph rappelait que « plusieurs monuments de même genre que celui-ci rappellent les noms de quelques prêtres de l’autel que les soixante cités des Gaules consacrèrent à Auguste .» Cette tablette est très importante, car le Marc Lucter mentionné est un descendant de notre Luctérius, qui fut le dernier chef Gaulois connut à lutter pour l’indépendance de son peuple. Il pourrait même être le petit fils du grand chef rebelle. Encore de nos jours, nous ne connaissons pas le sort qui fut attribué à notre illustre irréductible gaulois, César l’emmena-t-il à Rome comme Vercingétorix, ou bien sa soumission lui a-elle sauvée sa vie ? A l’heure actuelle nul ne peut prétendre le savoir.

Jacques-Joseph Champollion regrettait en 1816, qu’aucun monument n’eut était consacré à Luctérius, de nos jours le constat reste le même, seul un buste en marbre blanc exécutée en 1844 par un certain Dominique Molhnet, qui est exposé à la bibliothèque municipale de Cahors, honore la mémoire du grand Luctérius. A noter que Capdenac qui prétend être le lieu de l’ancienne Uxellodunum, a appelé sa place principale, « place Lucter ».

Mathieu MARTY

 

Manoir de Mordesson

La légende de Bertheline de Mordesson

Texte publié en 1942 à Saïgon dans « l’écho d’extrême-orient » Yves Desjeux

 » Sur la verte colline, en un vol de batailles,
Le vieux Manoir, jadis, a connu les fureurs ;
Les cris des chevaliers, et le sang des entailles,
Ont rougi ses vieux murs, de leurs rouges clameurs.
Joseph de Salvagnac

 

Lorsqu’il mourut, aux environs de 1360, Guarin de Castelnau, seigneur de Gramat, Loubressac, Lavergne, Prangères et autres lieux, laissait pour unique héritière une jeune fille de 18 ans répondant au nom de Bertheline. Pour supporter les charges d’une si vaste seigneurie Bertheline dut ajouter à la beauté et à la noblesse de sa naissance, les qualités de courage et d’audace qui font l’honneur du sexe fort . Les temps étaient durs ; l’anglais ravageait la Guyenne et le Quercy et les troupes de Jehan Chandos traînaient le massacre et le pillage sur leurs traces.

A la sombre forteresse de Castelnau, aux cinq puissantes tours de son château de Gramat, Bertheline préférait les agréments plus champêtres de sa baronnie de Prangères. Là, parmi les bois de châtaigniers, sur les hauteurs qui dominent le petit lac et d’où la vue s’étend très loin vers la cité de Gramat, les baronnies de Lavergne et Bio, et vers le couchant jusqu’aux gorges de l’Alzou et au-delà de Notre Dame de Rocamadour, Guarin de Castelnau avait fait construire le manoir de Mordesson.

C’était un rude homme le vieux Guarin. Mais les délicatesses de l’amour paternel et le sens du beau se rencontrent aussi chez les âmes rudes. Rien n’avait était négligé à Mordesson pour que l’enfance de Bertheline fut ensoleillée et charmée de tout ce que la nature et l’industrie des hommes peuvent apporter de beauté et de douceur de vivre. Aussi la jeune fille y passait-elle tout le temps que lui laissait l’administration de son vaste domaine.

Bertheline ne connut pas ces difficultés qui font trop souvent le malheur des dynasties quand les charges viennent à en retomber sur des épaules trop faibles. On se souvenait des vertus du vieux Guarin et l’on conservait à son héritière, la même fidélité loyale, avec, en plus, l’admiration que l’on a pour une jolie fille, douce et bonne. Jamais le grand et bel Amaury de Valon, seigneur de Lavergne et de Thégras, ni Jehan de Miers , que l’on appelait  » le brave « , ni Amidieu de La Rocque, réputé pour son exquise courtoisie, jamais cette fleur de la chevalerie n’eut voulu profiter de ces circonstances pour briguer un pouvoir tombé aux mains d’une femme ; ils se fussent crus déshonorés et malheur à quiconque oserait porter la main sur leur charmante suzeraine, car leurs épées et leur sang étaient garants de leur loyauté.

C’est pourquoi dans cet après-midi de juin 1369 ils étaient réunis à Mordesson, dans la salle du Conseil, autour de la robe blanche de Bertheline. On avait signalé dans la région l’approche des anglais, et toutes les forteresses de la seigneurie étaient garnies d’hommes d’armes. Mais c’était sur Mordesson que se dirigeait Jehan Péhautier capitaine de cinquante lances, parce que le château n’ayant pas de remparts, il pouvait s’emparer facilement de l’héritière de Guarin de Castelnau. Bertheline s’entretenait avec chacun comme un chef et comme un ami. Amaury de Valon, Jehan de Miers et quelques autres seigneurs renouvelaient leurs serments de loyaux services ; mais nul n’espérait autre chose que porter haut sa bravoure et son honneur, car ils savaient le cœur de Bertheline promis au jeune vaillant Bertrand de Terride, puissant en Périgord.

Il y avait aussi, près de leur suzeraine, les consuls de Grandes : Jean Cornilh, Jean de Merle, puis Hugues Orliac qui portait un jeune taureau sur ses épaules aux fêtes de la dîme, Bénédict Lafont, Bartolomé Darnis réputé pour sa connaissance des coutumes et des lois romaines, et enfin Antoine Bergonhos dont la richesse était l’occasion d’un proverbe. Tous étaient là, près de Bertheline parce que la vie, l’indépendance et la fortune de tous étaient en cause.
– Madame, dit Amaury de Valon, si vous le permettez, nous chanterons la chanson du Chêne et du Gui.
Bertheline rougit légèrement, car la chanson était d’elle. Les vois fortes et timbrées se mêlèrent à la sienne , et la mélodie jaillissait cristalline et fraîche comme les sources de l’Alzou , car, comme elles, elle s’exhalait du terroir.
 » L’ennemi ! Voilà l’ennemi !  » Le guetteur descendit de la tour ; il avait vu les cinquante lances de Jehan de Préhautier étinceler sur les glèbes du Causse-Nu, et l’on entendait les truands crier de joie dans l’espoir d’un triomphe facile. Mordesson n’avait pas de remparts.
Déjà Jehan Préhautier, le fer au poing avait pénétré dans la salle du Conseil, laissant sa horde dans la cour intérieure
 » – Quel est le Maître de céans ?  » rugit-il ! .
La jeune fille s’avança :
 » – Je suis Bertheline de Mordesson, seule héritière de Guarin de Castelnau. Que me voulez-vous ?
Le soudard perdit sa morgue. Le charme d’une femme est une arme redoutable pour les plus fiers soldats, parce qu’ils n’en rencontrent pas souvent sur leur chemin. Mais Jehan de Préhautier rêva d’une aventure singulière : sa voix rude prit des intonations plus douces et refoulant les injures qu’il s’apprêtait à dire, le routier chercha des termes dont il n’était pas coutumier :
 » – Je suis Jehan Préhautier, dit-il, capitaine de cinquante lances pour très haut et très puissant seigneur Jehan Chandos La valeur de ceux qui combattent sous la bannière de messire Saint Georges n’est plus à dire et l’on sait quelles ruines ensevelissent à cette heure ceux qui leur ont résisté. Mais c’est un autre sentiment que j’apporte dans cette enceinte.
Ce cœur qui ne frémit jamais dans les plus terribles rencontres, je le dépose à vos pieds, Madame, et pour peu que vous l’acceptiez, les gens d’armes qui vous défendent compteront cinquante lances de plus dans votre parti.  »
 » – Vous outragez, capitaine ! La fille de Guarin de Castelnau ne donnera pas sa main à un coureur d’aventures qui n’a de sang à son blason que celui de victimes innocentes.
Vous ignorez sans doute que le sang des Castelnau s’est mêlé à celui du Roi des Cieux en coulant aussi sur la Terre Sainte ! C’est là qu’il a gagné ses titres de noblesse. Et vous, capitaine, de combien de quartiers s’honore votre maison ?  »
Jehan Préhautier blêmit. C’était lui rappeler qu’il n’était qu’un capitaine d’aventure et que jamais le crime pour lui ne s’était distingué de la geste. Il voulu prouver qu’il connaissait aussi les bonnes manières de la chevalerie :
 » – Votre injure appelle vengeance, Madame. Désignez donc parmi les vôtres , celui qui m’en rendra raison  »
 » – Mes partisans sont de bonne lignée, capitaine, et nul ne dérogera. N’attendez donc point les honneurs d’un combat singulier avec un sang plus noble que le votre.  »
 » – Çà , Madame, vous m ‘en rendrez compte vous-même ! Je veux vous enfermer dans les prisons de votre château !  »
 » – Il n’est point de prisons à Mordesson, capitaine. Sans doute en eut-on construit si l’on avait songé qu’un capitaine de mauvaise rencontre s’aviserait un jour de tenir ici le langage d’un truand.  »
 » – Vous m’outragez encore, dit Jehan Préhautier au comble de la rage, mais prenez garde qui si truand suis, ne porte la main sur vous !  »
 » – Vous m’avez outragée d’abord, capitaine, réclamant ma main pour prix de votre trahison. Mais ce n’est pas un tel paiement qu’il faut aux gens de votre espèce : c’est trente deniers.  »
Jean Préhautier se fut lancé sur elle. Mais déjà Amaury de Valon levait son épée. Préhautier prit du champ :
 » – A moi compagnons, cria-t-il, et mort de sang !  »
Les truands se ruèrent dans l’enceinte, et les paisibles murailles du plus pacifique des castels, résonnèrent du tumulte des grands combats. Les injures des soudards se mêlaient aux défis des chevaliers, les épées s’entrechoquaient avec les masses d’armes, les pertuisanes recherchaient les défauts des cuirasses et les fentes des bassinets, et sur les tapisseries faites pour la joie des regards, le sang des hommes se mêla aux riches couleurs de l’art.
Bertheline, derrière le rempart des poitrines loyales, était agenouillée devant une effigie de Notre Dame de Roc Amadour :
 » – Bonne Dame, disait-elle, voyez ici combatre vos gentils seigneurs : Amaury de Valon qui richement dota le sanctuaire et Jehan de Miers qui prit la bannière des pèlerins et Amidieu de La Rocque qui bellement chante le cantique à l’office de la Mère-Dieu. Bonne Dame soyez en leur garde.  »
Maître Jehan Cornilh qui est sage et de bon conseil s’approcha d’elle :
 » Madame, dit-il, il convient fuir ! Quand truands sont plus de trois pour un, oncques chevalier ne l’emporte. Il convient fuir, Madame, pour le salut de votre baronnie !  »
 » – Fuir, Maître Cornilh ? Les Castelnau ont quelques fois péri sous le nombre, mais jamais montré le dos !  »
 » – Votre vie n’est point votre, Madame, reprit sévèrement Jehan Cornilh. Vous la devez à votre baronnie. Il convient fuir, que je vous dis !  »
Bertheline fit un grand signe de croix sur Maître Cornilh. Mais il ne disparut pas avec cette odeur de souffre qui caractérise les créatures du Malin et Bertheline comprit alors qu’il était de bon conseil. Elle disparut par la petite porte de la tour, sortit du Manoir, par la poterne qui n’était point gardée et s’enfuit par le sentier du lac.
 » – Messire, dit un truand à Jehan Préhautier, la Dame de céans s’est échappée par la poterne !  »
 » – Mort de sang, hurla le capitaine ; en selle compagnons et rattrapons-la ou j’y perdrais mon âme ! Mort de sang, mort de sang !  »
La poursuite fut infernale. Le sentier qui conduit au lac, à peine large pour Bertheline, fut le tombeau d’un grand nombre. Les cavaliers se heurtaient dans le torrent de la chevauchée, se brisant entre eux, tombant sous le flot des bêtes ou se broyant contre le tronc des chênes. Les injures se mêlaient aux cris désespérés, les blasphèmes et les hurlements se noyaient dans le fracas des cuirasses.
 » Mort de sang ! Mort de sang !  » hurlait Péhautier, mais le sang ruisselait des siens et la mort planait sur lui-même.
Légère comme les biches de la forêt, adroite comme elles, Bertheline avait gagné le lac quand les truands étaient à peine en selle. Là, à l’orée du chemin de Darnis, elle se heurte à l’Archange Saint Michel. Du moins, elle le crut, tant la splendeur du blanc cheval d’armes n’avait de comparable que l’éclatante armure du chevalier.
 » Voilà, pensa-t-elle l’archange des combats que m’envoie Notre Dame de Roc Amadour..  »
Sans mot dire le beau chevalier l’enleva de terre et la plaçant en croupe, piqua des deux en direction de Roc Amadour. A peu de distance le vacarme des poursuivants faisait trembler la forêt. Les imprécations de Jehan Préhautier parvenaient aux oreilles des fugitifs, mais le cheval de l’archange bondissait comme dans les miracles, rapide et léger comme le cheval de Dieu.
On traversa Darnis, puis Saint Germain de Rignac dont le moutier abrite des Saints, puis l’on s’engagea dans le petit sentier rocailleux qui mène à la Roque du Souci. Tout à coup Bertheline se rappela le gouffre sans fond vers lequel ils allaient tout droit et sa frayeur était grande. Mais un archange ne périt pas comme un simple mortel et sa Foi était encore plus grande que sa frayeur. Le blanc cheval galopait, museaux fumants, étincelant des quatre fers à l’allure du vertige et fonçait droit vers l’abîme.
Le cavalier céleste se signa en piquant des deux, le cheval s’envola dans les airs pour retomber de l’autre coté du précipice laissant l’empreinte de ses sabots dans la pierre. Et Bertheline sut que Madame Marie l’avait en garde. Mais emporté dans la violence de la chevauchée, Jean Préhautier et ce qui restait de ses cinquante lances furent se briser dans la Roque du Souci dans un tumulte effroyable d’os broyés et de blasphèmes.  » Mort de sang ! Mort de sang ! criaient-ils encore ; mais déjà avec leurs voix leurs âmes se perdaient en Enfer !
Les fugitifs, miraculeusement sauvés s’étaient arrêtés pour remercier Notre Dame de Roc Amadour Le chevalier sauveur souleva la visière de son heaume et Bertheline poussa un cri…
 » – Bertrand ! C’était vous ! Oh ! Bertrand !…
 » – Oui, Madame, c’est bien moi Bertrand de Terride qui loue le Ciel parce qu’il ma donné en vous sauvant la vie, de mériter ce cœur que vous m’avez promis. En apprenant que l’anglais ravageait les plateaux du Quercy, sans plus tarder suis venu car vous étiez en grand danger et perte certaine. Et m’en voyez heureux , Madame, comme oncque chevalier de bon encontre ne put l’être jamais !  »
Arrivés à Roc Amadour les deux jouvenceaux s’en allèrent trouver Madame Marie en son sanctuaire, et prièrent longuement. Belle était leur prière et leurs voix montaient le long du rocher béni vers la Vierge Noire , au milieu de la fumée des cierges et de l’odeur de l’encens. Messire Rogier de la Roque qui est premier chapelain de Notre Dame en son sanctuaire de Roc Amadour, entra dans la chapelle.
 » – Messire, dit Bertheline, voici Bertrand de Terride que je choisis comme époux devant Dieu.  »
 » – Messire, dit Bertrand de Terride, voici Bertheline de Castelnau que je choisi comme épouse devant Dieu.  »
 » – Soyez unis !  » répondit Messire Rogier de la Roque, premier chapelain de Notre Dame, en son sanctuaire de Roc Amadour.
Et cela se passait un jour de juin 1369.

Cette légende a été rapportée au début du siècle dernier par l’Abbé Bargues, curé de Prangères, à Yves Desjeux qui l’a transcrite pour sa pérennité.

 

LA CHANSON DU CHÊNE ET DU GUI .

Elle tremblait, la terre
Quand marchaient nos aïeux

Ils n’aimaient que la guerre
Ne craignaient que les cieux.
A Rome désarmée
Ils dictèrent les lois
En y jetant le poids
De leur vaillante épée.
Vaincus parfois, pour l’esclavage,
Non, jamais ! ils ne furent prêts.
Pour échapper à cet outrage
Allant dans leurs sombres forêts
Fer en main ils touchaient l’emblème.
De leur rude pas
Ils volaient de nouveau dans les combats suprêmes,
Pour n’être point soumis.
Qui donc leur forgerait leurs chaînes
A ces fils du Quercy ?
Ils étaient forts comme leurs chênes.
Et toujours verts comme leur gui !
César, aux lois de Rome
Voulut nous asservir,
Mais la Gaule eut un homme
Et qui savait mourir !
Héroïque Luctère
Redouté du vainqueur
Entends la Gaule entière
Te dire avec son cœur
La mort ! mais non pas l’esclavage !
Pour lui nous ne sommes pas prêts
Pour échapper à cet outrage
Allons dans nos sombres forêts
Là, nous contemplerons l’emblème
De notre fier pays.
Nous mourons s’il le faut dans les combats suprêmes
Pour n’être pas soumis.
César nous forgerait des chaînes
A nous , fils du Quercy !
Nous sommes forts comme des chênes
Et toujours verts comme leur gui !
Aujourd’hui, l’Angleterre
Veut te donner sa loi,
Et pense par la guerre
Avoir raison de toi.
De toi, terre des braves
De toi ,terre des forts !
Ah ! brise ses entraves
Affronte mille morts.
Oui ! la mort ! jamais l’esclavage
Pour lui nous ne sommes pas prêts !
Pour échapper à cet outrage,
Allons dans nos sombres forêts.
Là, serrant dans nos bras l’emblème
De notre cher pays
Nous mourrons s’il le faut dans les combats suprêmes,
Pour n’être pas soumis.
L’Anglais nous forgerait des chaînes,
A nous fils du Quercy !
Nous sommes forts comme nos chaînes,
Et toujours verts comme leur gui !

Ecuelle de Capdenac

L’écuelle de Capdenac

« J’ai insisté pour que cet article, soit publié, d’une part à cause du symbolisme chrétien, dont l’écuelle constitue un précieux témoignage, et aussi pour l’éclairage qu’elle apporte sur la présence des Cathares à Capdenac. »  Danielle PORTES Historienne des religions  Paris IV-Sorbonne

C’est au début des années 1990, que fut retrouvée à l’occasion de travaux de réfection des rues de Capdenac le haut, une très jolie écuelle, qui porte en son fond en ornement, un poisson assez naïvement représenté. C’est mon frère Julien et moi-même qui somme à l’origine de cette belle découverte faite dans la rue de la commanderie, proche de notre boulangerie familiale.

Ecuelle de Capdenac

Ecuelle de Capdenac

Nous conservâmes pendant longtemps ce fabuleux vestige à notre domicile, avant d’en faire don à l’Office du Tourisme, que le présente aujourd’hui dans son musée situé au premier étage du donjon de Capdenac.

Ce vestige fascina pendant longtemps toute ma famille, et il est donc logique que je tente de faire connaître le résultat de mes recherches, ainsi que mes conclusions, qui ne sont peut être pas définitives.

Le poisson représenté au fond de cette écuelle nous ramène obligatoirement au symbolisme sacré. En effet, il fut le symbole utilisé par les premiers chrétiens, comme signe de reconnaissance durant la persécution que leur firent subir les Romains.

En grec, le mot poisson se dit IXOYC (ICHTHYS). Disposé verticalement, ce mot formait un acrostiche (mot grec signifiant la première lettre de chaque ligne ou paragraphe). Le nom grec du poisson fut donc utilisé pour désigner les mots suivants : I : Iesous : Jésus  CH : Christos : Christ  TH : Theou : de dieu Y : Yios : le fils  S : Soter : le sauveur

Interprété comme acrostiche, ICHTHYS signifiait donc littéralement : « Jésus Christ, fils de Dieu, notre Sauveur ». Le simple symbole d’un poisson, représentait ainsi un véritable résumé de la foi chrétienne. On le retrouve sur de nombreux monuments funéraires des IV premiers siècles de notre ère, comme dans les catacombes à Rome. Les textes juifs, également annonçaient que le Messie viendrait de la mer sous la forme d’un poisson. La représentation des chrétiens, était donc la suite logique donnée aux écritures saintes.

C’est vers les IV-Vème siècles, que fut délaissé ce symbole. L’Eglise, qui possédait maintenant le pouvoir, préféra prendre comme nouveau symbole la « croix latine » comme signe et symbole de la chrétienté. L’Eglise fraîchement installée mena une lutte sans merci contre les anciennes croyances, la croix représentée la passion du Christ, c’était un objet unique, que le Messie lui-même avait transporté, alors que le poisson se rapportait aux forces naturelles, autorisant de multiples interprétations.

De plus le poisson était utilisé comme symbole dans plusieurs religions antérieures au christianisme, en sanscrit, le dieu de l’amour se nommait « celui qui a le poisson pour symbole ». C’est donc l’Eglise elle-même qui préféra abandonner le symbole qui unifia pendant longtemps les premiers chrétiens, qui transportèrent leurs nouvelles idées au milieu de populations hostiles.

L’écuelle retrouvée à Capdenac date des environs des XII-XIIIème siècles, et à cette époque, un nouveau mouvement vit le jour, et se répandit particulièrement en Occitanie, dont Capdenac faisait partie, dépendant directement du comte de Toulouse. Les membres de ce mouvement, nous les appelons aujourd’hui Cathares. Leur façon de vivre et de pratiquer leur religion se rapprochait des premiers chrétiens, et se détachait de l’Eglise de leur temps, qu’ils disaient corrompus et avide de richesses et d’honneurs. Les Cathares furent persécutés comme les premiers chrétiens, mais eux le furent par d’autres chrétiens.

Ce symbole pourrait tout à fait avoir été remis au goût du jour par les cathares, ce symbole désignant les premiers chrétiens, les chrétiens purs, qui comme les Cathares, avaient abandonné toute possession de richesses matérielles. Les Cathares peuvent tout à fait être associés aux premiers chrétiens, et le symbole du poisson aussi.

René Nelli, répertoria les objets présumés remonter à l’époque Cathare. Ce rigoureux professeur Carcassonnais considéra comme probablement cathares les symboles religieux datés du XI-XII-XIIIème siècles et dont les exemplaires sont trouvés avec une fréquence notable sur les sites cathares.Or déjà deux poissons furent inventoriés, un à Ussat, et un autre gravé sur un galet à Fontvieille dans le Gard. Ce même auteur nous signale que le scribe du rituel Cathare dit de Lyon fait souvent figurer au bas des pages, l’emblème du poisson.

L’écuelle de Capdenac pourrait donc s’avérer comme avoir appartenu à la communauté Cathare, ce qui en ferait une découverte assez exceptionnelle. Il ne faut pas oublier que Simon de Montfort assiégea par deux fois la place de Capdenac durant sa croisade menée contre les hérétiques Cathares, et que Bertrand de la Vacalerie, qui ne fut rien d’autre que l’ingénieur en machine de guerre qui apporta son aide aux Cathares de Montségur, venait du lieu dit « la Vacalerie » de .Capdenac. A suivre…

Mathieu MARTY

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