Une voix de femme au dessus de la mêlée

1891-1962

Marcelle MARQUES, de son nom d’état civil, naît en 1891 à Cherbourg où son père, Jean Marques, tient garnison en qualité d’officier d’artillerie et de marine. Elle est la deuxième fille d’une famille de quatre filles à laquelle se consacre une mère douce et attentionnée, Marceline Capy.

Les parents sont tous deux issus d’anciennes et solides familles paysannes de Pradines. Marcelle entame et poursuit, notamment à Toulouse, d’excellentes études secondaires, au cours desquelles elle manifeste des dons particuliers pour les disciplines littéraires. Après son baccalauréat elle entre, toujours à Toulouse, en classe préparatoire à l’École Normale Supérieure de Sèvres.

Enfant, puis adolescente, elle passe régulièrement ses vacances à Pradines chez ses grands-parents Capy auxquels elle voue une affection particulière. Elle s’attache à leur vieille demeure située sur un éminence, face à la vallée du Lot, en aval du bourg. Tous les siens la dénomment « Malte ». Elle deviendra plus tard sa propriété. Son amour du vieux mas durera autant qu’elle.

Vers la dix-huitième année, une rencontre avec Jean Jaurès lui révèle sa véritable vocation : elle sera écrivain, journaliste et militante. Dès lors, dans ses livres, ses conférences, ses articles, elle soutient un triple combat :

· pour la paix, en dénonçant l’horreur et l’absurdité de la guerre

· en faveur de la femme, en soulignant son rôle fondamental dans la société moderne, qu’a révélé avec éclat la guerre de 1914

· vers un socialisme humanitaire, de caractère surtout moral et philosophique, en prônant le devoir de solidarité et de compassion actives envers les individus qui souffrent et les peuples demeurés dans la misère.

En 1916, elle publie, sous le nom de Marcelle Capy, son premier ouvrage, préfacé par Romain Rolland : « Une voix de femme au-dessus de la mêlée« . Toujours dans la période d’entre deux guerres, elle fait paraître « La défense de la vie » (1918), « L’amour Roi » (1925), et son ouvrage majeur « Des hommes passèrent…« , couronné du prix Séverine. Ce roman raconte le passage, dans les familles de Pradines, de prisonniers allemands venus remplacer, aux travaux de la ferme, les hommes partis au front. Hymne à la réconciliation et la compréhension entre deux peuples ennemis, il est marqué d’une qualité d’écriture qui l’égale aux meilleures œuvres littéraires de l’époque.

En marge de son travail d’écrivain, Marcelle Capy poursuit une carrière de journaliste, engagée dans le combat politique et philosophique, non sans revenir, fidèlement, à l’évocation de la vie paysanne qui demeure au centre de sa pensée et de son cœur. (On pense à Giono). Elle collabore à de nombreux journaux, notamment à « La Vague », hebdomadaire pacifiste, voir antimilitariste, dirigé par le député socialiste Pierre Brizon qui deviendra, un temps, son deuxième mari. Après la deuxième guerre mondiale, elle fait paraître deux nouveaux romans : « La vie tient à un fil » et « L’Égypte au cœur du monde« . Elle rapporte de dernier d’un voyage en Égypte où elle s’est rendue auprès de sa sœur aînée, Jeanne Marques, femme cultivée, elle même journaliste et conférencière, liée aux milieux intellectuels, artistiques, de tendance progressiste, d’un pays qui s’éveille au monde moderne.

A partir des années 1950 elle se retire à Pradines, dans sa chère maison de Malte, vétuste certes, mais parée de couronnes qu’elle lui tresse volontiers. Désormais confrontée à une situation matérielle très modeste, malade et quelque peu oubliée, elle meurt en janvier 1962, après s’être rapprochée, au soir de sa vie, de la foi chrétienne, celle-là même de ses grands parents maternels.


Plaque apposée sur la tombe de Marcelle Capy et de ses parents au cimetière de Pradines
(Photo C. Lufeaux, mai 2010)

Son existence aura été riche de traverses (elle connut deux mariages malheureux, sans enfants, la détresse et la solitude), mais éclairée par le succès, la notoriété, la fréquentation de personnalités brillantes de la littérature et de la politique (Barbusse, Romain Rolland, Joseph Caillaux, Anatole de Monzie), les voyages de conférences en Europe, aux États-Unis, au Canada.

Ce qui donne un sens à cette vie, ce sont la force, la sincérité, la constance d’une généreuse conviction, servie par le talent d’une véritable femme de lettres.

 

Docteur Pierre GAYET, septembre 1998.
Nous remercions le Docteur Pierre Gayet d’avoir accepté de rédiger spécialement ce texte, condensé de la conférence qu’il a donnée le 21 octobre 1995, à la Bibliothèque Municipale de Pradines.

Marcelle Capy sur internet : (mise à jour janvier 2021) :

https://data.bnf.fr/fr/12014219/marcelle_capy/
http://cgecaf.com/mot1544.html
http://verdun-1916.chez-alice.fr/frameg/femme2.html
http://www.thiriez.org/filterie/doccapy1914.htm

 

Essai bibliographique réalisé par Madame Foulon en janvier 1996
Une voix de femme dans la mêlée – Préface de Romain Rolland. Paris, Éd. Paul Ollendorf, 1916 (20 cm, cartonné)

L’amour roi – Paris, Société mutuelle d’édition (25, rue de Lille), 1925 (179 p., 19 cm)

Des hommes passèrent – Paris, Éd. du Tambourin (142, rue Montmartre), 1930 (Roman, 339 p., 19 cm)

De l’amour du clocher à l’amour du monde – Conférence au groupe républicain lotois à Paris
Paris, Éd. Brutus (13, rue de la Cité Administrative), 1932 (20 p., 18 cm)

Men pass (Des hommes passèrent) – Traduit en américain par Victor Yakhoutoff
New-York, Lineright Inc. Publishers, 1932. (273 p., cartonné)

Du côté du soleil – Alger, Éd. Braconnier Frères, 1935 (176 p., 19 cm)

Avec les travailleurs de France – Paris, édité par l’auteur (3, passage de l’Union, Paris-VII), 1937 (119 p., 19 cm)

Femmes seules – Tarbes, Éd. Hunault (16, rue du Mal Foch), 1939 (Roman, 236 p., 19 cm)

La vie tient à un fil – Paris, Éd. Rivarol, collection Terres et Choses Françaises (323 p., 19 cm)

L’Égypte au cœur du monde
Collection La Plaque tournante. Paris, Éd. Denoël, 1950

L’homme et son destin
Conférence donnée à la salle de la Société de Géographie
Paris, Éd. de l’école addéiste (10, rue H. Duchêne, Paris-XV), 1951.

La défense de la vie – Paris, Éd. Ollendorf. (8e édition, 254 p., 19 cm)

Le fil luisant – (Pas de référence)

La maison de passage – (Pas de référence)

Nombreux articles ou contes dans La Vague, journal dont elle fût, un temps, rédacteur en chef et dans L’Égyptienne, revue à laquelle elle collabora régulièrement.

Femmes et travail
au XIXe siècle – Mémoires de femme. Coauteur avec Aline Valette. Paris, Syros, 1984.