Uc de Saint-Circ est né à Thégra à la fin du XIIème siècle. Son père, petit vavasseur (1), avait dû quitter son château de Saint-Cirq (graphie actuelle) situé sur l’actuelle commune de Couzou, sans doute ruiné par Henri Court-Mantel lors du sac de Rocamadour en 1183. Pour éviter une copropriété des biens familiaux (selon la coutume occitane, cadet d’une nombreuse fratrie, il était copropriétaire de ses biens avec ses frères) ses frères l’envoient étudier à Montpellier où on le destinait à l’état de Clerc.
Rappelons que Montpellier, alors sous la domination des rois d’Aragon et de Majorque, était une ville universitaire très importante où se retrouvaient de nombreux quercynois. Inversement, les professeurs de Montpellier enseignaient à l’Université de Cahors. Dans la capitale culturelle des rois d’Aragon où l’apport scientifique des musulmans et des juifs est important, Uc a pu acquérir, au moins en partie, les trois premières branches du savoir, le trivium : grammaire (latin classique), rhétorique et logique. Mais il ne devient pas clerc, il se fait jongleur et entre au service du comte de Rodez, du vicomte de Turenne et du bon dauphin d’Auvergne. Il sert de lien entre ces trois puissantes. Très tôt, il devient troubadour, nous dirions aujourd’hui, auteur-compositeur, un intellectuel profane du Moyen Age.
On le retrouve en Gascogne, auprès de Savaric de Mauléon, de la comtesse de Bénauges, en Poitou puis en Aragon et en Castille. En Provence enfin, d’où il gagne la Marche de Trévise vers 1220. Là il prend épouse et dernière date connue de sa vie, est accusé d’hérésie et d’usure en 1257 (Cathare ou bien Cahorsin ?). En Italie du nord, son rôle est fondamental dans la gestion de la Renaissance. Exilé, faidit, il apporte à sa patrie d’adoption le texte troubadouresque. Sur place il crée des vidas, premières biographies de troubadours marquées par la nostalgie d’un temps heureux, d’un pays perdu et remis dans le droit chemin obscurantiste par la ruée des croisés. C’est le point de départ, en Europe, de la critique littéraire en langue vulgaire et de la nouvelle en prose. Il y a un suivi des vidas au Novellino anonyme puis à Boccace et jusqu’à nos jours.
Uc est ainsi devenu, en Italie, un poéticien, un maître du trobar et plus encore, selon l’expression de Robert Laffont : « Le grand témoin de l’Occitanie en Italie ». Il ne nous reste qu’une cinquantaine de textes écrits par Uc et trois musiques qui permettent d’entrevoir un musicien de talent. Son œuvre est un « roman vécu ». Enfin, nous savons depuis peu, grâce aux travaux de Saverio Guida de l’université de Messine, qu’Uc de Saint-Circ et Uc Faidit sont une seule et même personne. Uc Faidit écrit vers 1240 le Donatz proençals, une grammaire, un traité de versification suivi d’un dictionnaire des rimes. Deux versions : une en oc et l’autre en latin. L’ouvrage est novateur (les exemples sont créés et non empruntés) et permettra à Dante, en différenciant le volgare du latino, de promouvoir l’italien moderne.
Depuis quelques années, l’Association Thégra Animation fait revivre Uc de Saint-Circ à travers un son et lumière retraçant sa vie et lui a consacré un colloque en 1998. Un cd de Gérard Zuchetto a été enregistré dans l’église de Thégra.
D’après : Anthologie des Poètes du Quercy, par Gilles Lades, éditions du Laquet et Encyclopédie du Lot, Bonneton.
Auteur : Gaston Bazalgues, Encyclopédie Bonneton, 2000
(1) VAVASSEUR, subst. masc. C’était le vassal d’un autre vassal, ou celui qui tenait un fief d’un vassal qui relevait lui-même d’un seigneur. D’autres historiens entendent que Vavasseur était une dignité immédiatement au-dessous de celle de baron.