Dans la première moitié du XIXe siècle, tous les observateurs de la société lotoise, confrontés au spectacle des violences auxquelles se livrent les habitants de cette contrée, expriment un sentiment d ‘effroi et d ‘incompréhension. La rixe, l ’empoisonnement, l ‘incendie criminel, apparaissent ici comme autant de modes sinon banals, du moins tolérés — voire, dans certains cas, valorisés — de règlement du conflit. Mais c ‘est par-dessus tout la fréquence et la brutalité des guerres inter-villageoises qui suscitent l ‘étonnement des contemporains : chaque été, les habitants de communes rivales s ‘engagent dans des cycles de défis et de vengeances qui peuvent, par le jeu des alliances qui se nouent entre localités voisines, embraser des cantons entiers.
Cette violence, pourtant, n ‘a rien de « sauvage » ni d ‘anarchique. Elle traduit une éthique spécifique — celle de l ‘honneur, composante fondamentale du statut —, et doit être mise en relation avec les formes d ‘organisation et les principes de fonctionnement de la société rurale. Elle n ‘est pas non plus incontrôlée : bien des litiges s ‘achèvent, au terme d ‘une procédure très élaborée de médiation ou d ‘arbitrage, soit par un « arrangement « , soit par une réconciliation rituelle.
Face à l ’emprise croissante de la répression pénale, la société quercynoise fait preuve d ‘une étonnante capacité de résistance à l ‘acculturation : ainsi n ‘est-il pas rare qu ‘au terme d ‘un véritable parasitage du procès, la violence de la répression judiciaire soit détournée de sa fonction première pour être intégrée au jeu des vengeances privées.
C’est cette histoire mouvementée qu’explore ici l’auteur, à partir des archives judiciaires.
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