La couasne de Floirac (1) forme un chenal localisé en rive gauche de la Dordogne, large d’environ 30 m, séparant le lit majeur de la terrasse de Floirac ; elle est dominée par la petite falaise supportant le château de Pech d’Agudes.
Ce chenal, en communication avec la Dordogne par un étroit goulet, peut être remonté en barque sur environ 150 m. Dans le prolongement du chenal, un lit très envasé, quasiment à sec une grande partie de l’année, se prolonge jusqu’à proximité du moulin de Bascle. En étiage un léger courant issu d’une source pérenne (Q ~ 5 à 10 l/s) alimente le chenal ; d’autres sources de moindre importance, dont la grotte-source (2) (Q <0,5 l/s), jalonnent la falaise.
La falaise supportant la terrasse de Floirac entaille les marnes et les calcaires jurassiques (Toarcien, Aalénien et Bajocien). Elle est affectée de multiples diaclases et failles dont les directions principales sont : N 70° E et NS. Schéma de l’environnement de la couasne de Floirac Le long de la falaise surplombant la couasne on observe de nombreuses cavités dont les principales sont la grotte du Port-Vieux et la grotte-source.
En étiage, la profondeur de la couasne est très difficile à évaluer à cause des irrégularités du fond et de l’abondance des algues et autres encombrements (troncs d’arbres etc…) du chenal. Elle avoisine une profondeur moyenne d’environ 1 m. A une trentaine de mètres en amont de la grotte de Port-Vieux, un seuil rocheux forme un haut fond proche de quelques décimètres de la surface.
Environnement géologique
La couasne de Floirac est située dans un contexte géologique particulièrement intéressant, elle se localise dans deux unités géologiques très contrastées : Les alluvions de la basse plaine de la vallée de la Dordogne et les calcaires jurassiques formant la base du causse de Gramat.
Les alluvions de la vallée de la Dordogne.
La Dordogne, dans son parcours quercynois, coule au fond d’une vallée (altitude de 85 m au Roc à 125 m en amont de Gintrac) encaissée et très pittoresque. De Puybrun à Souillac, la rivière développe de vastes méandres dont la rive concave est dominée par de hautes falaises entaillant profondément les calcaires du Jurassique.
Les terrasses étagées, généralement localisées sur le lobe des méandres, supportent des alluvions fertiles distribuées sur trois niveaux d’accumulation : la basse plaine, la moyenne terrasse et la haute terrasse. L’épaisseur totale des alluvions de la basse plaine est de 7 à 8 m en aval (secteur de Souillac), elle dépasse localement 10 m vers Pinsac (12,5 m au sondage de Baussone), 10 m au Pont de Carennac pour atteindre exceptionnellement 20 m à l’ancienne gravière du Pont de Floirac.
Les formations jurassiques
Le Toarcien forme l’ensemble des pentes boisées ou herbacées qui séparent la falaise domérienne de la corniche des causses de Gramat et de Martel. Au voisinage de la vallée de la Dordogne, le sommet du Toarcien consolidé de bancs calcaires, forme falaise et le contact avec l’unité supérieure (Formation d’Autoire : Aalénien-Bajocien) peut se localiser une dizaine de mètres au-dessus du pied de la corniche du Causse. La partie supérieure du Toarcien, qui voit l’apparition de faciès carbonatés est bien visible, elle arme la base de la falaise au voisinage de la source de la couasne. Sur ces marnes reposent ensuite un ensemble à majorité calcaire où des Pleydellia apparaissent dès la base : au Moulin de Bascle.
L’Aalénien (formation d’Autoire, membre de La Toulzanie (3)) affleure vers la base de la falaise entre la grotte source et le moulin de Bascle. Cet ensemble est identique à celui décrit à la coupe de La Poujade (Loubressac) montre, reposant sur le Toarcien, 5 à 6 m de calcaires roux, bioclastiques à oncolites de plus en plus fréquents vers le sommet, surmontés par 8 à 10 m de dolomies macrocristallines à rognons de silex bruns. Une surface ravinée, parfois soulignée par un niveau à géodes (calcite et quartz bipyramidés) limite cet ensemble au sommet.
Le Bajocien (formation d’Autoire, membres de Calvignac et du Pech Affamat (3)) forme les grandes falaises, en rive droite et en rive gauche de la vallée de la Dordogne, entre Gluges et St.-Denis-lès-Martel. Il forme un affleurement remarquable entre la fontaine de Briance et La Croix de Mirandol. Coupe géologique de la couasne de Floirac
ORIGINALITE ET HYPOTHESE DE FORMATION DE LA COUASNE
La couasne constitue le témoin d’un ancien bras de la Dordogne qui isolait l’île de la Borgne des coteaux jurassiques et qui s’étirait entre le pont suspendu d’Ourjac et le Pech d’Agudes. L’examen des anciens cadastres et des photographies aériennes prises à quelques décennies d’intervalles, fait apparaître des changements notables, à l’échelle humaine, de la morphologie de la basse plaine de la vallée de la Dordogne.
Le lit majeur du fleuve occupe l’ensemble de la basse plaine. Les alluvions très épaisses, que nous estimons à 6 à 8 m dans la couasne, atteignent près de 20 mètres d’épaisseur en amont de Vayrac. Cet alluvionnement de la basse plaine masque presque complètement le substratum jurassique, on l’observe seulement au seuil de Copeyre (le rocher coupé), quelques kilomètres en aval de la couasne et il s’agit certainement d’un ancien méandre recoupé.
La Dordogne, à cette époque, contournait par le SE le rocher sur lequel est construit le château de Foussac et parcourrait la plaine entre les Vacants et le bourg de Floirac. Les couasnes de la vallée de la Dordogne constituent des reliquats de bras divagants de la Dordogne dans sa vaste plaine alluviale. Elles se forment par obstruction d’un bras de la rivière ; des végétaux arrachés aux berges, des levées graveleuses déplacées par les crues ou des effondrements rocheux sont à l’origine des ces obstructions qui peuvent être permanentes ou temporaires. « Généralement, cet abandon d’un bras de la rivière est lié à l’abaissement d’un seuil, par déplacement de sédiments dans un autre bras qui va devenir par-là le lit principal » (4) .
Parfois, les obstructions isolent le chenal du lit vif de la Dordogne, on est alors en présence d’une mare d’eau stagnante désignée bras-mort. En étiage, la couasne de Floirac est principalement alimentée par une source, issue vraisemblablement de la nappe aquifère des alluvions de la basse plaine, et dans une moindre mesure, par les écoulements du karst jurassique, dont certains sont bien visibles en longeant la falaise bordière.
(1) Couasne : ce mot est utilisé dans la vallée de la Dordogne pour désigner un chenal abandonné aux eaux souvent stagnantes (bras-mort).
(2) CARRIERE M. (1962) - Spéléologie de la commune de Floirac. Spélunca n° 2, p. 39-40.
(3) PELISSIE T. (1982) - Le Causse jurassique de Limogne-en-Quercy: stratigraphie - sédimentologie - structure. Thèse doct. 3ème cycle, Univ. de Toulouse.
(4) Carrière M. communication orale
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